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J'ai vécu dans votre futur, et ça n'a pas marché

Intéressé par tout ce qui touche au wokisme, je me suis penché sur un article paru dans le numéro 1395 de l'hebdomadaire Marianne™, écrit par Emmanuel Tellier. 
Mais avant de rentrer dans le vif de ce sujet, je vais revenir sur l'article qui le précède au sommaire (toujours de la plume du même auteur), et qui revient sur l'histoire de Disney©. Une entreprise dont le projet (éditorial) n'a jamais été neutre, précise-t-il d’emblée ! 
            Comme le dit Emmanuel Tellier donc, dans la « course à l'attention » que se livrent les fabricants d'imaginaire, Disney© est désormais un « monstre industriel en situation de (quasi-) monopole » ; ce que Disney© ne sait pas faire, Disney© le rachète ! 
Emmanuel Tellier s'attarde d'abord sur la difficulté qu'il rencontre à entrer en contact avec qui que ce soit du « groupe aux 200 000 salariés ». Voire d'entrer dans un des nombreux parcs à thème de la société, et de poser des questions auxdits salariés. 
Mais cette Mission : Impossible™, E. Tellier l'a acceptée. 
            Heureusement, l'entreprise maintenant centenaire, a des spécialistes qui acceptent de parler ; comme Sébastien Durand. Dont Tellier nous conte l'histoire d'amour (un peu vache comme nous le verrons) que ce fin connaisseur a commencée avec elle, dès 1973. 
Il en ressort en substance que les temps ont changé : au cours des seventies il était bien plus facile de dialoguer avec la célèbre entreprise. 
Le spécialiste revient bien évidemment sur le parcours de Walt Disney - maintenant bien documenté - auquel il apporte toutefois son propre point de vue. 
On y apprend que d'un management paternaliste Walt Disney passera à une direction plus autoritaire, et que proche des idées du Parti démocrate il deviendra un généreux donateur du Parti républicain. Un peu comme si des cornes avaient commencé à lui pousser.
Patriote pendant la guerre, Disney© s'apprête cependant à vivre « l'épisode le plus sombre » de sa saga : le maccarthysme. Et vu par Tellier & Durand, ça sent de plus en plus le souffre.
            Walt Disney, nous dit Sébastien Durand, a dénoncé trois anciens grévistes à la Commission des activités antiaméricaine (HUAC), c'est en effet très vilain. Mais « personne ne perdra son emploi après ses déclarations ». Ce qui n’empêche pas Sébastien Durand de dire qu'il y a « des choses dans sa vie qui sont indéfendables » ?!
Question de contexte dirait certainement la présidente de Harvard.
Et puis ces supposés communismes, étaient-ils d'affreux Rouges ou pas ? 
            Mais Emmanuel Tellier n'en démord pas : « Il n'en sera pas de même dans les autres studios de cinéma. Procès Stalinien, vengeances, suicides : de 1946 à 1957, le maccarthysme fera la peau à plus de 1000 "mauvais américains". ». Rien à voir avec Walt Disney, mais il fallait visiblement que ces choses soient dites. 
Reste que « procès staliniens » ; il fallait oser dans le cadre des années 1950 et de la lutte anti-communiste ! 
            Emmanuel Tellier se garde bien de donner les chiffres des soviétiques (par exemple) tués par le communisme ou emprisonnés dans les goulags, à la même époque. 
Le « maccarthysme » de toute façon est toujours une formule accusatoire, y filtre l'image d'un régime capitaliste ennemi du pluralisme, et bourreau de la libre pensée (Cf. Yana Grinshpun). 
En accusant quelqu'un de maccarthysme on est sûr de se trouver de bon côté du doigt. D'autant qu'il est vrai que l'U.R.S.S. était alors connue pour être le paradis dudit pluralisme, et que la pensée y était libre. 
Or donc, si les méthodes étaient bien évidemment contestables, l'émergence du maccarthysme était néanmoins liée à un danger tout ce qu'il y avait de concret. Ce que ne semblent à aucun moment envisager Tellier ni Durand. 
Un effet du Privilège rouge®
            En tout cas, Emmanuel Tellier n'hésite pas à faire de Walt Disney le 
« tonton idéal d'une Amérique (blanche) ». Sans qu'aucune explication ne soit donnée quant à cette précision leucoderme. Sinon qu'elle semble nous renseigner sur la vison du monde qu'a l'auteur de l'article. 
            Plus loin nous apprenons que c'est sa passion pour les trains miniatures, un hobby conseillé par son médecin pour tenter de vaincre son stress maladif, qui donnera à Walt Disney l'idée d'un parc d'attraction. 
Cela est fort possible, mais je crois que la célèbre White City de l'Exposition universelle de Chicago (1893) où son père Elias avait travaillé, n'y est pas pour rien non plus. Elle a d'ailleurs influencé des gens aussi respectables qu'E.R. Burroughs ou encore L. Frank Baum (liste non exhaustive). 
            Ensuite E. Tellier déballe un catalogue d'idées toutes faites sur la 
« fabrique à images » : « toujours les mêmes messages [..] le caractère sacré de la famille, les conséquences tragiques pour qui s'aviserait le trahir », la 
« résilience », le « dépassement de soi ». Manque plus que l'éloge des mathématique.
En effet Disney© a l'outrecuidance d'offrir non seulement aux Américains, « mais aussi au monde entier », « des histoires qui les rassurent, les réconfortent ». C'est en effet inacceptable. 
Où sont les incitations aux émeutes, l'apologie du trouple, Walt Disney n'est-il pas au fond qu'un réactionnaire !? 
            Mais bien sûr que si, d'ailleurs le « conservatisme bon teint de cette Amérique wasp » nous dit Emmanuel Tellier, [TRIGGER WARNING : propos ridicules] « persuadé que son modèle de vie est le meilleur pour l'humanité toute entière, repart en mission à travers la planète, [..] » comme au « XVIe siècle, l'Espagne et le Portugal envoyaient côlons et conquistadors pour "éduquer" les peuples d'Amérique su sud. ». (C'est moi qui souligne)
Sans rire! 
Après les procès staliniens du maccarthysme, Emmanuel Tellier compare Disney© aux colons (qui à l'époque étaient surtout des aventuriers) et aux conquistadors. Il fallait oser (Cf. Michel Audiard).
Tout au plus concède-t-il que l'entreprise de divertissement Disney© le fait 
« certes de manière plus pacifique ». 
Une précision qui aurait pu m'échapper, merci.
            Un prosélytisme (supposé), qu'on retrouve dès le chapeau de l'article où Emmanuel Tellier écrivait que le monstre industriel qu'est devenu Disney© a un projet éditorial qui « n'a évidement jamais été neutre ... ». Tout comme lui, d'ailleurs qui dans l'article suivant s'attaque au « virage woke » de l'usine à rêves américaine, avec des pudeurs qui en disent long. Un projet éditorial (le sien) qui forme, finalement, un continuum avec le wokisme qu'on reproche justement à l’entreprise. 
Manière de dire que tout cela n'est pas bien grave, que de tout façon c'est (quasi-) ancestral, et qu'en plus c'est « une philosophie qui n'est contesté par personne ».
Comme il sera dit dans ce deuxième article donc, où l'on apprend que les derniers films de la firme de Burbank ont été passés « à la moulinette du wokisme le plus crispé ». Ce qui laisse donc supposé qu'il y aurait un wokisme qui ne l'est pas, crispé. Un wokisme bienveillant peut-être ? 
            D'entrée de jeu, Emmanuel Tellier montre que sa fixation sur la couleur de peau n'est pas qu'une vue de mon esprit, puisqu'il précise dès le début de son second article que Disney© est dirigée par « des hommes blancs de 70 ans ». Dont acte ! 
            Ces septuagénaires blancs, dont les mérites respectifs ont été réduits à la couleur de leur peau, s'émeuvent nous dit-il, que les minorités (ethniques, sexuelles ..) ont été opprimées et discriminées pendant trop longtemps, et que l'entreprise qu'ils dirigent se doit d'être exemplaire. Malgré, précise Tellier, sa promptitude à « promouvoir tout un paquet de stéréotype au siècle dernier ». On a beau vouloir changer, le passé nous rattrape toujours, les commissaires politiques y veillent !
Un virage politique, dont « le fondement philosophique, en lui-même, n'est d’ailleurs contesté par personne », écrit Emmanuel Tellier (voir supra). 
Eh bien si justement, il l'est. 
« Et puis bien sûr, les minorités longtemps invisibles (c'est vrai) tiennent désormais le haut de l'affiche : la Petite Sirène 2023 était [..] noire » Oui Emmanuel Tellier aime bien les parenthèses, dans lequel il donne son avis. 
Plus loin il ne nous apprend pas vraiment quelque chose, puisque l'intéressée s'est justement répandue dans les médias à ce propos : Rachel Zegler, « aux jolies couleurs métissées » et qui interprétera Blanche Neige (sic) déteste le film de 1937. Et que l'idée de garder les sept nains dans la distribution, « jugés par nature offensante », a été écartée. 
Que les Nains en question soient des personnages féériques, qui « par nature » n'ont rien à voir avec les « personnes avec un retard de croissance » ne semble pas effleurer Emmanuel Tellier. « Quid de l'inclusivité » se demande-t-il avec à propos. 
Ne lui vient pas plus à l'idée que Blanche Neige (dont le patronyme est pourtant tout un programme) est un personnage de conte allemand, ou que Hans Christian Andersen était Danois. 
Il faut dire à la décharge de notre reporter que le zeitgeist n'hésite pas à inclure dans l'adaptation de l’œuvre de Tolkien des « racisés » comme on dit dans le novlangue woke, ou à transformer Isaac Newton en natif du Sous-continent indien (dans un épisode de la série Doctor Who). 
            Revenant sur les bonnes intentions du groupe en matière de recrutement, Emmanuel Tellier n'hésite pas à déclarer que cela se passe dans « un pays où le racisme profond reste très présent ».
Voyons les chiffres : « Aux États-Unis, entre 1959 et 2021, il y a eu 52 518 Noirs tués par des Blancs, contre ... 155 785 Blancs tués par des Noirs » (Cf. Existe-il un racisme systémique en Occidents ? / Samuel Fitoussi/Le Figaro™ du 27-11-23). Sans commentaire ?!
             L'auteur concède toutefois que « cette course à la vertu est sans fin, et certainement voué à l'échec. », c'est moi qui souligne. « Certainement » ; qu'en des termes choisis ces choses-là sont-elle dites, non ?!
            Un peu plus loin Tellier revient sur une loi du gouverneur de Floride visant à interdire l'évocation, dans des classes d'élèves de 6 à 9 ans (quand même !), de questions liées aux préférences sexuelles. 
S'il ne prend pas partie, il souligne que DeSanti le gouverneur en question est un « Homme de droite (très droite) ». Une neutralité et une précision qui en dit long, encore une fois.
            Emmanuel Tellier ira jusqu'à traduire le mot woke - qui était je le rappelle, une revendication de la nébuleuse progressiste (attention faux-ami) américaine, avant de désigner de manière péjorative cette idéologie nihiliste - en « éclairé », dans ce qui m'apparaît comme, là encore, une tentative de redorer le blason du wokisme
            Au final, on sent bien en lisant cet article que si le nombre de spectateurs et de visiteurs ne piquaient pas du museau comme il le dit lui-même, le « virage woke » de Disney© ne vaudrait pas qu'on en parle. Ou alors, comme cela est suggéré par Emmanuel Tellier, de manière bienveillante. 
            En conclusion, nous avons le portait à charge d'un homme, de son entreprise, et un article de complaisance sur le tournant woke de ladite entreprise. Et d'une manière générale sur le wokisme.
À aucun moment Emmanuel Tellier ne relève que l'Allemagne n'a pas une tradition d'héroïnes de conte métissées. Pas plus que les sirènes danoises ne sont Noirs. 
Il ne se demande pas à quoi rime qu'une actrice dise du mal d'un film dont elle occupera le rôle principal dans son remake. Et pour lui, la présence ou non des sept nains, pose la question de l'inclusivité. Quand bien même ne risque-t-on pas d'en rencontrer dans la vie courante. Pas plus que des géants ou des trolls. 
Bref, comme disait ma grand-mère : on n'a pas le cul sorti des ronces !
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Le poster qui illustre cette entrée est ©Quijano, et son titre est une citation de Vladimir Boulovski.

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