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Articles

Affichage des articles du juin, 2018

Black Monday Murders t1 [J. Hickman/T. Coker]

•••• J onathan H ickman utilise pour sa nouvelle série, prévue en (au moins) 12 numéros, le phénomène, bien connu des lecteurs de science-fiction, dit de la réification. Quand bien même Black Monday Murders tient-elle plus du fantastique que de la SF. Pour le dire autrement, il n'est plus question ici d'interprétations symboliques ou allégoriques des métaphores, mais de les prendre au pied de la lettre, et d'en faire des situations concrètes. Matérielles. Ainsi l'idée nietzschéenne que « Dieu est mort » devient-elle tellement concrète, dans le cas d'une réification, que son corps est trouvé flottant dans l'océan. Il faudra donc le remorquer au-delà du cercle polaire, pour empêcher qu'il ne se décompose [ En remorquant Jéhovah / J ames M orrow].  C'est cette inversion du point de vue qui provoque (ou devrait provoquer) la sidération cognitive des lecteurs. Laquelle commence dès la couverture du recueil de la série, qu'il faut prendre au 1 er d

Les Enfermés [John Scalzi/Mikael Cabon]

•••• L e roman policier de type whodunit , mystère en chambre close, etc. n'a pas attendu le XXI ème siècle pour intéresser les auteurs de science-fiction. Qu'on pense à A simov, P hilip K . D ick ou encore à P oul A nderson pastichant Sir A rthur C onan D oyle, voire plus récemment les enquêtes de Greg Mandel . Sans oublier le Voleur quantique [ Pour en savoir + ], bref l'enquête policière ou le roman criminel, a très tôt été « upgradée » en une version SF™, tout à fait compatible avec les standards imaginés par A llan E dgar P oe.        Ainsi les auteurs qui restent dans la veine traditionnelle, et ceux qui extrapolent un futur plus ou moins proche, des univers parallèles ou des planètes lointaines, ont-ils les mêmes préoccupations : donner l'impression que les lecteurs peuvent eux aussi, à l'instar du ou des enquêteurs, découvrir le ou les auteurs des crimes commis. En outre, rétrospectivement, l'enquête doit rester suffisamment solide pour continuer

Normal [Warren Ellis/Laurent Queyssi]

•••• L 'acteur et scénariste P atrick M c G oohan semble avoir aujourd'hui définitivement abandonné l'idée de poursuivre sa série culte. Dommage ! Fort heureusement, W arren E llis vient, avec la novella dont il va être question ici, de me reconnecter avec ce sentiment -inégalé- de malaise et de paranoïa propre au Village et à la Guerre froide. Si Normal , un peu moins de 200 pages au compteur, m'a évoqué cette vieille série télévisée, le propos d' E llis est pourtant l'exact contraire d'une réminiscence passée.        En effet, obnubilé *   par le futur, le quinquagénaire natif de l' Essex en fait un objet de hantise. Sentiment, cela dit, assez unanimement partagé. De fait, qui n'a jamais eu peur de l'avenir !? Si le fantastique a, en très grande partie, bâti son succès sur les châteaux et autres lieux hantés par un passé qui -justement- ne passait pas, W arren E llis construit (d'une manière que je vous laisse découvrir) a co

Les Enquêtes de Douglas Brodie [Gordon Ferris]

Kilmarnock est une ville (ou plus exactement un burgh ) de l' East Ayrshire en Écosse , laquelle a la particularité d'avoir vu naitre G ordon F erris, ainsi que son héros Douglas Brodie . Mais également le poète & romancier W illiam M c I lvanney, à qui on attribue d'avoir inventé ce qui deviendra le « Tartan noir », lorsqu'à la fin des années 1970, il écrit la première enquête de l'inspecteur Jack Laidlaw . Mais si le monde est petit, il n'est pas simple, et c'est I an R ankin, mondialement connu pour son flic écossais John Rebus , qui nommera ainsi ce courant du Roman noir.        La scène se déroule il y a déjà quelques années, à Nottingham , lors d'un festival du polar. R ankin sollicite de J ames E llroy une dédicace, tout en lui expliquant que lui aussi écrit des Romans noirs. Centrés sur Édimbourg , ils explorent le côté sombre de l' Écosse ; « vous pouvez appelez ça le Tartan noir » dit-il à un E llroy qui rigole, et dédicace so

Aleister & Adolf [D. Rushkoff/M.A. Oeming] Wetta

L a danse macabre de l'occultisme et du national-socialisme, aussi anecdotique qu'elle fut, n'en occupe pas moins une importante place dans l'imaginaire collectif occidental. À un point tel, qu'on en prendrait facilement n'importe quelle vessie pour une lanterne.  Difficile en effet d'y voir clair dans cette relecture à rebours de l'Histoire, mais dont le pire danger serait d'euphémiser le régime nazi. Lequel, mais est-il nécessaire de le rappeler, s'est constitué sur l'antisémitisme et le racisme. •••• F ort heureusement, D ouglas R ushkoff & M ichael A von O eming s'en abstiennent. D'autant plus facilement, que leur propos, et leur point de vue est ailleurs. Ceci étant, ils ne se gênent pas pour surfer sur une relecture tout aussi fantaisiste de la Seconde guerre mondiale. Ce qui est, si j'ose dire, de bonne guerre, puisque jusqu'à preuve du contraire Aleister & Adolf (traduit par H ugo P eronnet pour les

Goliath [Saison 1] David E. Kelley/Jonathan Shapiro

•••• J amais cela ne m’avait frappé autant, avant de regarder la première saison de Goliath , une série télévisée de 8 épisodes. Mais depuis au moins la création de D avid E . K elley & J onathan S hapiro, je regarde les séries télévisées judiciaires d’un autre œil ; lesquelles ne semblent pas avoir finalement de différence de nature avec la fantasy mais tout au plus, de degré.  « Expecto Patronum ! »          Certes, il s’agit ici d’une fantasy urbaine et contemporaine, mais dans laquelle les articles de loi, les recours, la jurisprudence, etc. , que se jettent aux visages les avocats des parties adverses n’ont rien à envier aux formules magiques de tel ou tel magicien. Il faut voir, dans Goliath justement, Billy McBride (alias B illy B ob T hornton) circonvenir le juge Roston Keller (dans le deuxième épisode) à coup de « précédents » et d’articles de loi comme autant d’abracadabras performatifs * .  La parenté est ici encore renforcée, en ce que le véritable ad

Lazare en guerre [Jamie Sawyer/Florence Bury]

Quinze ans sous l'uniforme, et 15 années supplémentaires à barouder dans les jungles d'asphalte de métropoles inhospitalières, réécrivent forcément nos scripts mentaux exécutables. Sinon, comment expliquer que je puisse trouver attractive une série romanesque de SF militaire ? Trois romans et une novella plus tard, « Lazare en guerre » gagne même ses galons de science-fiction militariste. Shocking! GAME OF DRONES •••• S 'inspirant d'une des facettes les plus médiatiques de la stratégie contre-terroriste étasunienne, J amie Sawyer invente un nouveau type de personnage. Lequel peut toutefois être rattaché sans forcer, à quelques ascendants glorieux. Tel Edward Anglesey ( in Jupiter et les Centaures de P oul A nderson), appartenant au même domaine de l'Imaginaire que le sien. Ou même le John Carter d' E dgar R ice B urroughs. Volontairement ou non, il s'approprie ce faisant, l'un des reproches le plus souvent exprimé à l'encontre des pers

The Authority : Humains malgré tout [John Ridley/Ben Oliver] Panini

•••• L orsque J ohn R idley écrit un album de BD - entendez un récit conçu et publié directement sous cette forme et non pas sous celle de plusieurs mensuels comme il est courant de le faire aux U.S.A . - pour l’éditeur DC Comics , il est déjà un véritable couteau suisse de l’ entertainment , que sa réputation précède.  L’un de ses romans a été adapté par O liver S tone ( U Turn /1997), il a également déjà écrit le scénario de Les Rois du désert avec G eorge C looney, et il fait partie de l'équipe des scénaristes de la série télévisée New York 911 , pour ne citer que certaines de ses activités les plus en vue.  Bref un CV tout ce qu’il y a de plus engageant, et qui s'est encore étoffé depuis. …. Humains malgré tout , l’album dont il est question ici, s’insère dans la franchise créée par W arren E llis & B ryan H itch en 1999 pour l’éditeur WildStorm , devenu la propriété, depuis 1998, d'une autre maison d'édition DC Comics .  Avec cette série, intitulée T

Honor Harrington : Mission Basilic [David Weber/Arnaud Mousnier-Lompré]

•••• C omme l'a justement fort bien écrit Garth Ennis [ The Boys , Preacher , etc. ], parlant de la bande dessinée de guerre : « voilà la meilleure façon de faire et de vivre la guerre, sans autre danger que de se couper au doigt avec le tranchant d'une feuille de papier ». Façon de voir les choses qui sied très bien à Mission Basilic , la première aventure de ce qui est devenue aujourd'hui une importante saga de science-fiction martiale. Ce roman, écrit par D avid W eber, et traduit par A rnaud M ousnier- L ompré, suit les aventures d' Honor Harrington , jeune officier de la Flotte royale manticorienne.  Dès la dédicace à C . S . F orester, éminent romancier connu pour son roman The African Queen (porté à l'écran par J ohn H uston) et, ce qui nous intéresse surtout ici, le cycle d'aventures maritimes centré sur Horatio Hornblower , officier de la Royal Navy , D avid W eber prend un cap qu'il ne quittera pas. Lequel se traduit principalement par une

Deep State [Mark Strong] série TV

•••• B rève série télévisée comme semblent les affectionner les britanniques, DEEP STATE annonce clairement la couleur dès sont titre. En total contradiction avec tous les protocoles en vigueur. De fait, l'expression deep state qualifie l'idée d'un « d’un État dans l’État », fabriqué à partir de réseaux et de conspirations, dans le but d'ourdir des assassinats, de nommer des hommes politiques redevables, voire d'entretenir une forme de «guerre éternelle™ », seule capable de nourrir le béhémoth militaro-industriel, déjà dénoncé en son temps, dit-on, par le président D wight D . E isenhower. Et c'est à M ark S trong alias Max Easton qu'on demande d'aller faire le ménage, malgré sa mise à la retraite. Si DEEP STATE met quelques épisodes à proposer quelque chose d'un peu neuf dans le milieu de la série télévisée d'espionnage ; ses deux propositions sont suffisamment inattendues, et téméraires, pour ajouter un surcroît d’intérêt à un show

Tomb raider [2018]

•••• C'est en regardant cette nouvelle aventure de Lara Croft , que j'ai mis le doigt sur ce qui coinçait avec son prestigieux prédécesseur, inventé au siècle dernier. Bien qu'ayant vu tous les films qui lui ont été consacrés, les aventures toutes aussi trépidantes d' Indiana Jones ne m'ont jamais totalement satisfait.  Et c'est Tomb Raider qui m'a fait découvrir pourquoi. H arrison F ord campe un personnage bien trop conscient de ce qu'il est, à la limite de franchir le Quatrième mur™, et Indiana Jones hérite ainsi d'une sorte de désinvolture et d'une confiance en soi dont le résultat et de rendre l'adversité et les obstacles qu'il rencontre, absolument inoffensifs. Rien ne semble vouloir entamer son aura de héros, pour la simple et bonne raison qu'il sait que les scénaristes ne lui veulent pas de mal (contrairement à moi, soit dit en passant, qui lui en veut d'avoir chipé le rôle à T om S elleck).       Tout le contrair

Le Vieil homme et la guerre [John Scalzi/Bernadette Emerich]

•••• L e Vieil homme et la guerre , de J ohn S calzi, relève de ce qu'on appelle communément le space opera , et plus précisément de sa version militaire. Un aspect martial présent, et moteur du récit fondateur du genre.  Du moins si l'on s'en tient au quadrant étasunien du space opera . Un récit originel, paradoxalement antérieur à l'invention du terme, et qui précède même l'invention de la science-fiction elle-même, en 1926. Il peut sembler contre-intuitif de citer une origine datant d'avant l'invention de ce qu'elle désigne, et pourtant.      Si pour des raisons historiques, éditoriales et pratiques j'identifie la naissance de la science-fiction (SF) à la sortie, en 1926, du premier numéro d' Amazing Stories , un pulp magazin e créé par H ugo G ernsback, il est évident que des textes relevant du genre lui ont préexisté. C'est d'ailleurs sur et grâce à ce corpus, que G ernsback a pu édifier son propre projet éditorial. Antériori