Accéder au contenu principal

Suicidez-moi ! [Ross Thomas / André Bénat]

Deuxième roman publié de Ross Thomas (1926-1995), « Suicidez-moi ! » remet en selle Mc Corkle & Padillo, déjà vus dans son précédent opus, lequel se déroulait à cheval sur les deux Allemagnes de la fin des années 1960. Cette fois-ci nous sommes à Washington.

Et comme dans Un petit coup de main il s'agit pour Thomas de révéler l'arrière-cours de nos démocraties, un sujet dont on lui prêtait une vaste connaissance. 

            Il imagine ici une conspiration, dont le modus operandi ne manquera pas de rappeler celui d'un assassinat encore très vivace dans l'inconscient collectif américain de l'époque (et toujours présent).

« Suicidez-moi ! » se distingue par une précision quasi mathématique des relations de causes à effets, et une écriture très clinique. Aucune place n'est laissée à la psychologie des sentiments, Jean-Patrick Manchette aurait sûrement parlé d'écriture « béhavioriste ». Enchaînant pourtant les retournements de situation ainsi que les doubles (voire les triples) jeux, « Suicidez-moi ! » donne l'impression que chaque personnage a -au moins- deux coups d'avance sur ses rivaux, et le tout est décrit avec un détachement, et une quasi absence d'empathie. Reflet parfait des faits et gestes des personnages principaux.

Quand bien même l'intrigue repose pourtant sur un chantage, dont l'enjeu est la vie d'une innocente. 

C'est à la fois très déstabilisant et très captivant. 

Plus le récit avance, plus les contre-mesures pour tenter de faire échec à la manipulation en question et sauver l'innocente se compliquent. À tel point que Thomas, au travers de ces deux « héros », ressent la nécessité de faire le point assez souvent. C'est tellement utile que ça ne semble jamais redondant. 

            Si « Suicidez-moi ! » est le témoin de son époque, non pas seulement grâce à ce qu'il dit mais aussi dans sa manière de le faire, il l'est aussi au travers de sa traduction par André Bénat. 

Ross Thomas prouve ici, une fois de plus, que la date de péremption de ses romans n'est pas encore atteinte.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations ...

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'...

Nebula-9 : The Final Frontier

... Nebula-9 est une série télévisée qui a connu une brève carrière télévisuelle. Annulée il y a dix ans après 12 épisodes loin de faire l'unanimité : un mélodrame bidon et un jeu d'acteurs sans vie entendait-on très souvent alors. Un destin un peu comparable à Firefly la série de J oss W hedon, sauf que cette dernière bénéficiait si mes souvenirs sont bons, de jugements plus louangeurs. Il n'en demeure pas moins que ces deux séries de science-fiction (parmi d'autres telle Farscape ) naviguaient dans le sillage ouvert par Star Trek dés les années 60 celui du space opera . Le space opera est un terme alors légèrement connoté en mauvaise part lorsqu'il est proposé, en 1941 par l'écrivain de science-fiction W ilson T ucker, pour une catégorie de récits de S-F nés sous les couvertures bariolées des pulps des années 30. Les pulps dont l'une des particularités était la périodicité ce qui allait entraîner "une capacité de tradition" (...