Accéder au contenu principal

The Looming Tower [suite, et fin]

       Si la série ne s'affranchit pas totalement des longueurs que je lui reprochais [Pour en savoir +], elle gagne cependant en intensité. À la fois grâce à la mise en scène des événements, lesquels s'intensifient ; et par l'éminence de l'inéluctable que l'on connaît. 
À ce propos, le traitement de l'effondrement des deux tours du World Trade Center, tout en sobriété, a gardé intact sa charge émotionnelle. D'autant que la préparation des terroristes occupe une place importante dans les derniers épisodes, et que ce compte à rebours qui ne dit pas son nom est d'une redoutable efficacité. Tout comme le portrait en creux qu'on leur dessine, très loin du manichéisme qu'on s'attend peut-être à trouver.
 
Ainsi apparaissent-ils certes coupables, mais en quelque sorte, bien moins responsables que l'administration Bush ou la CIA. Ou leurs commanditaires. 

Portrait à charge d'une administration donc, au travers de Condoleezza Rice, seul membre de l'administration qui occupait le pouvoir, à apparaître dans la série. Son inaptitude à comprendre, mais surtout à prendre en compte les alertes formulées par Robert Chesney (alias Bill Camp, magnifique) n'est jamais que le reflet d'un ensemble, l'administration dont elle est la conseillère à la Sécurité nationale, tout aussi sourd et inapte qu'elle. 
Là où la série fait preuve d'un machiavélisme édifiant, si je puis dire, c'est en montrant des reconstitutions de l'enquête parlementaire qui ont eu lien en 2004, donc sous la forme de fiction, et ensuite, un peu plus tard, de nous montrer les mêmes scènes extraites cette fois-ci, des archives télévisée. Tout y est rigoureusement exacte.
Le même dispositif est tout aussi cruellement appliqué à George Tenet (interprété par Alec Baldwin), l'alors directeur de la CIA. Ses réponses aux questions de la commission sont, elles aussi, édifiantes.

Cela dit, pour en revenir à Condoleezza Rice (interprétée par Elisa Davis), ce qui ne manquera pas d'apparaître à ceux qui regarderont la série télévisée comme des erreurs inadmissibles autant qu'une désinvolture homicide, ne l'empêcheront pas de devenir secrétaire d'État (autrement dit l'équivalent français du ministre des Affaires étrangères), entre 2005 et 2009.  

Portrait également à charge de la CIA.

Seul le FBI, et plus particulièrement les hommes de John O'Neill, qui occupait avant de le quitter le poste de directeur de la branche antiterrorisme du bureau de New York, sortent grandis de cette reconstitution télévisée, romancée.

Si la série gagne en intérêt au fur et à mesure, son moment de bravoure, qui vaut quelques soient ses faiblesses relatives, qu'on la regarde, est sans aucun doute l'interrogatoire du garde du corps de Ben Laden, alors incarcéré au Yémen, menée par l'agent du FBI Ali Soufan (alias Tahar Rahim, magistral). 
Voilà ce qu'en a dit l'acteur lui-même : « C'est un face à face entre un homme, Ali Soufan, qui connait très bien sa religion, et un mec qui se dit musulman et qui finalement ne la connait pas. Tout au long de cet interrogatoire, il va lui donner une leçon de théologie. C'est une scène magistrale parce qu'elle montre en dix minutes ce qu'on s'efforce d'essayer d'expliquer parfois pendant des heures. ». Dont acte !

D'autant que cette séquence est réalisée avec beaucoup de rigueur et de soin, et que les acteurs présents, sans exception, sont par contre d'une exceptionnelle justesse.  

        Si The Looming Tower est une série télévisée qu'on peut voir comme un thriller, elle est aussi un formidable témoignage sur un événement qui a changé durablement la face du monde, et qui donne de surcroît l'envie d'en savoir plus. Ne serait-ce que pour le comprendre, car nous y vivons encore.

Mais c'est aussi, une fois de plus, la preuve éclatante du talent des fictions américaines pour écrire leur roman national, et en faire -en quelque sorte- un roman mondial.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations dont l'évidence paraît pour

Nebula-9 : The Final Frontier

... Nebula-9 est une série télévisée qui a connu une brève carrière télévisuelle. Annulée il y a dix ans après 12 épisodes loin de faire l'unanimité : un mélodrame bidon et un jeu d'acteurs sans vie entendait-on très souvent alors. Un destin un peu comparable à Firefly la série de J oss W hedon, sauf que cette dernière bénéficiait si mes souvenirs sont bons, de jugements plus louangeurs. Il n'en demeure pas moins que ces deux séries de science-fiction (parmi d'autres telle Farscape ) naviguaient dans le sillage ouvert par Star Trek dés les années 60 celui du space opera . Le space opera est un terme alors légèrement connoté en mauvaise part lorsqu'il est proposé, en 1941 par l'écrivain de science-fiction W ilson T ucker, pour une catégorie de récits de S-F nés sous les couvertures bariolées des pulps des années 30. Les pulps dont l'une des particularités était la périodicité ce qui allait entraîner "une capacité de tradition" ( M ich