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Sebastian O2

Grant Morrison & Karen Berger
Le premier devoir dans l'existence, c'est d'être aussi artificiel que possible. [..]
Oscar Wilde 

... Or, donc Sebastian O est un dandy, une sorte de super-héros steampunk (dans le cas présent) dont le masque serait mondain. Le dandy est une figure complexe qui aura connu moult incarnations ; non seulement au travers de ceux qui se sont revendiqués d'elle en des variations subtiles, mais aussi au travers de l'évolution de ceux qui l'ont incarnée. 
Je ne vais donc pas tenter d'en donner une définition absolue mais plutôt par petites touches de nous en approcher. 
Dans Le Peintre de la vie moderne Charles Baudelaire décrit le dandy comme "un de ces êtres privilégiés en qui le joli et le redoutable se confondent mystérieusement", jamais définition n'aura plus collé à Sebastian O (ou à Jerry Cornelius).
Le dandysme écrit Michel Le Maire est "une réaction pour établir la personne humaine dans ce qu'elle a de beau, d'unique, face à une société qui tend à uniformiser, à réduire les êtres", et c'est exactement la position qu'occupera, certes à son corps défendant puisque dans l'ignorance de la machination, Sebastian O face à Theo Lavender.
Magie de l'intertexte ; le lecteur d'aujourd'hui pensera certainement à Matrix
Le style du dandy nous dit Pierre Le Vigan c'est "apparaître, disparaître, et laisser une aura", une belle définition dont on devine qu'elle combine admirablement en un alliage intertextuel le personnage de Janus Stark le roi de l'évasion (apparaître/disparaître) et le Sublime anglo-saxon d'Edmund Burke (laisser une aura) ; et qui convient parfaitement à Sebastian O.  
... Au départ Sebastian O est un projet destiné à Disney Comics qui veut proposer à ce moment là, nous sommes en 1991, un label visant un lectorat différent, plus adulte, que celui de ses productions habituelles. C'est à Todd Klein qu'échoit la privilège de réfléchir à un logo.
Finalement Touchmark ne verra jamais le jour et, au moins trois des projets qui lui étaient destinés : Sebastian O, Enigma et Mercy seront publiés par le label Vertigo de DC Comics grâce à Art Young qui travaillait sur le projet Touchmark et Karen Berger qui dirigera la collection de DC Comics destinée nous dit Patrick Marcel, dans un dossier consacré à Vertigo par SCARCE (n° 41 & 42) à la "génération X dont on parle beaucoup aux États-Unis, généralement déboussolée et cynique, qui lit de l'horreur et retrouve dans ces comics l’atmosphère un peu nihiliste du monde actuel". 
La mort de Dieu condition du nihilisme moderne
... Qualifié par Patrick Marcel de "scénario squelettique, hâtif et mal abouti", Sebastian O lui apparaît comme un "brouillon de bonnes idées qui aurait mérité un meilleur traitement" (SCARCE n°42) ; et indéniablement je suis resté sur ma faim au terme des trois numéros de cette histoire.
Outre une exposition du contexte et des personnages assez trop longue compte tenu de la brièveté de la mini-série, il faut attendre le troisième et dernier numéro pour que l'intrigue s'emballe et livre de nombreuses pistes prometteuses qui, faute de numéro(s) supplémentaire(s) resteront lettre morte. Dommage.
De cette fin en queue de poisson, on peut tirer cependant une satisfaction un peu douloureuse, en repensant au principe que doit appliquer le dandy selon George Brummell : "rester dans le monde tant qu'on n'a pas produit d'effet, disparaître dés qu'on a produit un effet sur la société qui nous environne".
À n'en pas douter Steve Yeowell réussit son effet, lui qui réalise cette aventure dans un style très dépouillé que je qualifierai de Sublime. Une véritable métaphysique des apparences en totale adéquation avec ce virtuose du bizarre qu'est Grant Morrison. 

Sebastian O est donc une mini-série, que je qualifierai de steampunk gothique, qui aurait mérité un développement un peu plus conséquent tant sa richesse le lui permettait, mais qui laissera je pense cependant une empreinte positive sur les gens qui la liront.  

Commentaires

  1. de tout façon, dès que tu parles de morrison, je suis au taquet

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