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Articles

Affichage des articles du mars, 2020

La couleur venue d'ailleurs [H.P. Lovecraft / Arnaud Demaegd]

Écrite dix ans avant la mort de son auteur, « La couleur venue d'ailleurs », sûrement plus connue sous le titre de La couleur tombée du ciel , est une nouvelle qui paraît en septembre 1927 dans le pulp magazine Amazing Stories . Celui-là même de l'inventeur du mot « science-fiction », H ugo G ernsback. Et dont le projet éditorial a mis le genre sur orbite.             Récit de l'hypertélie lexicale par excellence, « La couleur venue d'ailleurs » est la description d'un « premier contact » qui s'est déroulé aux alentours de la ville d' Arkham (MA), en 1882. Très loin de l’anthropomorphisme que d'autres choisiront plus volontiers, H . P . L ovecraft décrit en creux ce que l'extra-terrestre en question, fait à ceux qui sont dans son environnement proche.  Récit d'une épouvante venue d'outre-espace « La couleur venue d'ailleurs » est d'abord une énigme. Autrement dit, le grand atout de cette histoire en est l'absence de rép

Running with the Devil [Nicolas Cage / Laurence Fishburne]

« Un cartel de drogue rencontre un problème : ses « clients » décèdent. Mauvais pour les affaires. Le big boss ordonne donc à son chimiste de tracer un chargement ; de la Colombie jusqu'aux U.S.A. , en passant par le Mexique et le Canada , pour identifier celui qui s'en met plein les poches à ses dépends. » « Running with the Devil » partage son affiche entre N icolas « je voudrais être le Klaus Kinski californien » C age, et L aurence « Morpheus » F ishburne. Si ce dernier ne tourne visiblement pas autant que son compère, sa filmographie force le respect. Et dans ce film, F ishburne montre qu'il est avant tout un acteur, et qu'il n'a pas peur de se mettre en danger. Le cas de N icolas C age est sensiblement différent. Si on met de côté ses déboires personnels, on ne peut pas nier le « Nicholas Cage effect © ». Autrement dit, quel que soit son rôle, N icolas C age fait du N icolas C age. Et il tombe assez souvent juste. Comme ici.  « Je suis

Meurtre au 43e étage [John Carpenter / Lauren Hutton]

Fin des années 1970, une jeune femme emménage au 43e étage d'une résidence huppée, à Los Angeles , dénommée « Arkham Towers ». Ça ne s’invente pas !             « Meurtre au 43eme étage », dont on dit que l’histoire s'inspire d’un fait divers, est l’œuvre de J ohn C arpenter. Ce téléfilm s’intercale entre Assaut , et juste avant Halloween . Et l’atmosphère et certains de ses plans n’auraient d’ailleurs pas juré dans le slasher consacré au 31 octobre. Tourné en moins de trois semaines, ce thriller est, si on veut, un démarquage de Fenêtre sur cour d’ A lfred H itchcock, dont il inverse le point de vue.  Si plus de quarante ans nous sépare de son tournage, « Meurtre au 43eme étage » se distingue encore par les deux portraits de femmes qu’il propose.  Le personnage principal, une jeune célibataire sûre d’elles, énergique, et qui sait renvoyer dans les cordes les machos en tout genre qui l’importunent. Et de l’autre, une lesbienne, que le scénario ni les autres personna

Second souflle [Mike Carey]

Nouvelle lecture récréative, et presque de circonstance, « Second souffle » de M ike C arey 1 adopte le point de vue interne d'un mort-vivant en devenir. Et qui le deviendra entre temps. Presque goguenard, le personnage en question est de ceux à qui on ne la fait pas. Sauf que s'il n'y avait pas d'imprévus, il n'y aurait pas d'histoire non plus.             M ike C arey, aussi connu sous le nom de M . R . C arey. De qui j'ai justement beaucoup aimé le dernier roman en date : Fellside . Et dont j'aimerai vous parler dès que j'aurai trouvé les mots pour le faire.  M ike C arey donc qui écrit ici une nouvelle très sympathique, laquelle réserve malgré le confinement du lieu restreint où elle se déroule et sa distribution étique, son petit effet surprise.  Qui tient plus, pour être honnête, d'un crescendo un poil chaotique M ike C arey a visiblement pris du plaisir à l'écrire, si j'en juge par celui que j'ai pris à la lire. E

'71 [Yann Demange / Jack O'Connell]

Nous sommes en 1971, et la capitale de l' Irlande du Nord est littéralement déchirée par « les Troubles ». Cependant, la guerre civiles entre protestants et catholique n'est qu'un village Potemkine™ pour le scénariste G regory B urke et le réalisateur Y ann D emange . En effet, « '71 » est un survival urbain ; violent, viscéral et absurde ; plutôt qu'un film historique ou social. « La situation était confuse »             Cinéma de l’efficacité et du ressenti, le survival est aussi surtout le résultat d'une formule : • Unité d'action : sauver sa peau coûte que coûte.  • Unité de lieu : ville, quartier, appartement  • Unité de temps : quelques heures ; jusqu'à épuisement des personnages.  Les Troubles donc, euphémisme anglais qui rappellera celui de « pacification », qu'utilisait le gouvernement français en parlant de la guerre d' Algérie , ne servent que de contexte disais-je ; le scénario prenant bien soin de renvoyer t

Le miracle d'Ivar Avenue [John Kessel / Frédéric Serva]

Lue presque malgré moi, cette novelette de J ohn K essel m'a d'abord captivé par le style dans laquelle elle avait été écrite. Ici joliment traduit par F rédéric S erva. En effet, contrairement à ce que laisserait supposer la couverture ci-contre (d'un recueil où elle est cependant présente), j'ai lu ce texte dans l'anthologie Privés de Futur ( dont j'ai déjà parlé hier ). Lequel texte n'entretient qu'un rapport ténu avec la science-fiction proprement dite. Nonobstant qu'elle lui est indispensable.             Or donc, captivé disais-je, j'ai dévoré la trentaine de pages d'un récit qui se déroule dans le milieu du cinéma, et qui démarre sur la découverte d'un cadavre qui laissera circonspect l'inspecteur Lemoyne Kinlaw . Et le lecteur, s'il ce dernier ne se savait pas en train de lire une histoire de Sf. Toutefois, circonspect je l'ai quand même été quant à ce que J ohn K essel avait voulu dire avec « Le miracle d'

The Way Back [Ben Affleck / Gavin O'Connor]

Faux film de sport, « The Way Back » est certes un mélodrame sur le deuil, mais pas seulement. On y suit Jack Cunningham , ex-star de l'équipe de basket-ball de son lycée au mitan des années 1990, recruté, de nos jours, par le Père Devine pour palier la défection de leur entraîneur. B en A ffleck grâce à l'intensité de son jeu, contrebalance heureusement l’excessive dose de  « pathos » que le réalisateur G avin O' C onnor et son scénariste B rad I ngelsby, y ont injecté. Il n'est cependant pas le seul à jouer juste.  Tous le reste du casting , dont on peut dire sans risque de se tromper qu'il occupe pourtant des seconds rôles, tant la présence d' A ffleck est écrasante, apporte la nécessaire vraisemblance qu'un tel film demande. Au-delà des apparences ; le faux film de sport, le deuil, l’alcoolisme, autour duquel les propres problèmes de B en A ffleck n'ont pas manqués d'être évoqués. « The Way Back » m'a frappé par la description, à

Le grand éveil [Kim Newman / Patrick Marcel]

Bay City , au début de 1962. Un détective dur-à-cuire affronte, à son insu, une menace bien plus grande que celle que fait peser H iro- H ito sur la côte ouest des États-Unis. « Hammett a sorti le roman policier du vase vénitien où il se trouvait, pour le jeter dans la rue. » Et K im N ewman y a invité Ceux des profondeurs.             « Le grand éveil » est une nouvelle relevant de ce qu’on pourrait appeler l’Esthétique de la fusion © . C’est-à-dire des récits où se mélangent les genres (science-fiction, polar, espionnage, thriller , etc. ), pour faire, eux-mêmes, genre.  Cela dit « Le grand éveil » est surtout un texte qui en a conscience, et qui pousse le mélange jusqu’au pastiche. (À consommer sans modération).  Il s’agit en effet d’une histoire de détective à la Philip Marlowe , mais qui se retrouverait au sommaire de Weird Tales . Le pulp magazine bien connu qui a accueilli, notamment, H . P . L ovecraft.  Cette nouvelle fait cependant partie d’un plus vaste projet é

Secret Avengers [Remender / Zircher / Hardman]

L'évocation, par le scénariste étasunien R ick R emender, de différents projets avortés 1 m'a donné envie d'en (re)lire un qu'il avait proposé à l'éditeur Marvel ® , et qu'il avait réussi à mener à bien.             Les univers partagés de super-héros, sont de ceux où « l'habit fait le moine ». Il y est donc difficile d'introduire des personnages de premier plan en mission secrète.  Barbouze rime difficilement avec super-héros. Le premier épisode du premier arc en est la preuve irréfutable. On y voit en effet Captain America et Œil de faucon , s'introduire dans une ville, en secret. Et dans leur tenue respective de super-héros !? Cet entrée en matière, numérotée 21.1, abuse également, outre de la crédulité de ses lecteurs et d'une décompression, très décomplexée.  Autrement dit, ce qu'a à nous dire ce numéro, et qui réside en l'attribution du leadership de l'équipe des Secret Avengers , aurait dû prendre une page maximum.

Delhi [Vandana Singh / Stéphan Lambadaris]

« Delhi » est la deuxième nouvelle de V andana S ingh que je lis. Et compte tenu de la déception qu'avait été Infini (dans la traduction de G illes G oulet pour la revue Angle Mort © ), il n'aurait pas dû y avoir de seconde fois. Mais curieusement, en feuilletant le troisième numéro de Fiction (printemps 2006), et vu ma propension à ne pas forcément lire toutes les nouvelles d'un coup, je me suis plonger dans « Delhi » sans même y penser. Par curiosité. Parce que je ne l'avais pas lue. Curieux donc, puis rapidement intéressé par Aseem et ce qui lui arrive tout au long de cette petite dix-huitaine de pages. Bien que je ne puisse finalement pas dire de quoi parle exactement cette histoire. Sauf qu' Aseem présente toutes les caractéristiques d'un psychogéographe 1 (qui s'ignore).             Une nouvelle qui captive donc, grâce à son atmosphère, nourri par un semblant d'intrigue que V andana S ingh évite d'expliquer. Ou que mon idiosyncrasie

Exhalaison [Ted Chiang / Sylvie Denis & Roland C. Wagner]

La branche de la Science-fiction que l'on nomme communément « Hard science », se distingue en tant que la science elle-même y occupe un rôle essentiel. Voire le rôle principal. « Exhalaison », une nouvelle de T ed C hiang, au sommaire du cinquante-sixième numéro du trimestriel Bifrost , en est un bel exemple.             Roublarde, elle commence ainsi : « On a longtemps affirmé que l'air (d'aucun l'appellent argon) est la source de la vie. ». Si les plus attentifs n'ont pas pu laisser passer l'allusion à l'argon, la suite reste dans un registre raisonnable. Jusqu'à ce que, quelques lignes plus loin, huit pour être précis, on apprenne que « Chaque jours, [...] nous ôtons nos poumons vides de notre cage thoracique [..] ». À ce moment-là, le commutateur de notre horizon d'attente vient de définitivement basculer. L'imaginaire s'ajoute à l'imagination, et le départ est immédiat et au-delà de notre « bulle de présent » ( sic ) .  

Quand l'ombre se répand sur la Maison Jaguar [Aliette de Bodard / Camille Thérion]

Au sommaire de la revue Galaxies (nouvelle série) n°13/55, « Quand l'ombre se répand sur la Maison Jaguar » est une novellette que j'ai lue sur un malentendu. Je croyais, avant, et même pendant sa lecture que « la Maison Jaguar » faisait partie du cycle dit des « Chroniques Aztèques (alias Obsidian & Blood) », dont (seul) le premier roman a été commercialisé par les éditions Panini Book /Éclipse. Que nenni ! • Contexte :             « la Maison Jaguar » est un texte qui se rattache à l'univers de XUYA. Un empire galactique qui prend le Vietnam et la Chine comme modèles. Alors que l'action s'y déroule dans un avenir lointain et ressortit au Space-opera . Surprise, « la Maison Jaguar »se déroule à Tenochtitlan , la capitale de l’empire Mexica . À une époque qui m'a semblé plus contemporaine qu'un futur lointain. La solution à cet imbroglio se trouve dans un entretien que l'autrice a accordé à la revue Angle Mort , dans son douzième numér

Les jardins de Kensington, une autobiographie non autorisée

C’est « le début d’une belle amitié » , pour citer la fin de Casablanca…              R odrigo F resán, né en Argentine , <la même année que les X-Men >, est un « lecteur qui écrit » , nous dit-il. Et qui voit toute son œuvre comme une grande maison, avec autant de pièces. Ses romans sont donc des mises en pièces, qui pour être lus demandent d’être ouverts, pour y pénétrer.  Le passé n’est jamais simple.              Éclairée par l’ombre de J ames M atthew B arrie, « Les jardins de Kensington » est la biographie confession de Peter Hook , auteur de nombreux et populaires romans « jeunesse », qui s’entretient, le livre durant, avec l’interprète de son jeune héros -d’encre et de papier-  Jim Yang .  L’occasion pour lui de dresser la biographie de celui qui se révélera un modèle, et d’établir ce qu’ont en commun l’ère victorienne et les swinging sixties . L’une a en effet inventé l’enfance, et l’autre lui a donné une nouvelle jeunesse.  Et sa propre autobiographie.