Accéder au contenu principal

Jack Staff

... Souvent présenté comme le résultat d'une proposition faite à Marvel pour le compte d'un de ses personnages (Union Jack) Jack Staff est en fait le résultat des cogitations de Paul Grist après qu'il eut appelé Marvel pour savoir si l'éditeur serait intéressé, justement par une proposition sur Union Jack ; n'ayant aucune réponse mais lui-même intéressé par sa propre idée, il s'est mis à développer ce qui deviendra Jack Staff. Mais précise Paul Grist dans l'édito du troisième numéro de The Weird World of Jack Staff Britain's Greatest Hero, il n'avait pas encore écrit quoi que ce soit sur le sujet pour l'éditeur étasunien. Ceci étant dit, le lecteur attentif aura remarqué le titre à rallonge de la série ; il y a à cela une raison que les lecteurs de longue date connaissent : si au départ (2000) la série s'intitule du nom du héros, elle a toujours été le point de rendez-vous d'une multitude de personnages opérant dans la ville de Casteltown. Ainsi, et c'est là l'une des particularités de Paul Grist, la narration de chaque numéro suit en même temps les péripéties de plusieurs personnages présentées comme ses propres aventures mais selon un découpage original : un peu comme si on réunissait les pages d'un numéro de Batman, d'un numéro de Superman et d'un numéro d'Hellblazer au sein d'un fascicule, chacun des protagonistes se voyant octroyer des séquences de deux à trois pages, à la suite des unes des autres. Un univers (vraiment) partagé dont, dans le cas de Jack Staff l'épicentre est la ville de Castletown.



... Or donc dans cette ville de Castletown on croise aussi bien des flics hardboiled, une unité d'enquête dont le terrain de jeu est le surnaturel, bien évidemment des magiciens, des voyageurs du Temps, un chimpanzé responsable de la "normalité de la réalité", des extra-terrestres ou peut-être est-ce des habitants d'un univers parallèle, des amis imaginaires etc .. et tout ce petit monde vit des aventures qui se croisent et s'entrecroisent, des aventures (et des moments plus intimes) menées de main de maître par Paul Grist.



... L'une des particularités qui apparaîtra au lecteur ayant un peu de bouteille dans le domaine de la BD (et plus largement dans celui de la Fiction), ce sont les clins d'œil  que s'autorise le scénariste.
Par exemple Zipper Nolan n'est pas sans évoquer  Little Nemo de Windsor McCay (et ses aventures évoquent tout autant Peter Pan que L'Île au Trésor), ou bien encore les Freedom Fighters (qui opèrent durant la Seconde Guerre Mondiale) sont-ils un bel hommage aux Envahisseurs ( a.k.a The Invaders de la Marvel) ; de même que The Eternal Warrior semble être l'incarnation du Champion Éternel de Michael Moorcock mixé avec Adam Eterno (l'un aillant peut-être influencé l'autre, ou pas). En outre Paul Grist n'hésite pas à transplanter dans ses histoires des personnages appartenant à notre réalité tel Morlan the Mystic qui n'est pas sans ressemblances avec Alan Moore (bien qu'au sujet de ce dernier j'ai démontré avec vigueur qu'il est probablement une création de Steve Moore) : dans l'une des histoires où il apparaît, Morlan n'hésite pas à avaler une sorte de démon qui semble lui faire l'effet d'un buvard de LSD. 


D'autre part à l'instar d'Alan Moore (justement) et de sa fille Leah (Cf. Albion), mais avec plus de réussite selon moi Paul Grist s'inspire du "cheptel" britannique en matière de justiciers, super-héros et autres surhommes.

Des personnages que le lecteur français a connus (pour certains) au travers des Petits Formats de l'éditeur MonJournal : Janus Stark, Adam Eterno, L'œil de Zoltec (chez Jack Staff on parle de la "Pierre de Valiant" ; Valiant étant  le titre d'une revue anthologique d'aventures en Grande-Bretagne où ces personnages s'ébattaient) ou encore Main d'Acier et bien d'autres encore ....
Toutefois si d'aventure vous faisiez partie de ceux qui n'ont pas connaissances de ces références il est peu probable que cela vous empêche de savourer l’inquiétante étrangeté des aventures de Jack Staff.                    

... Mais Paul Grist n'est pas seulement scénariste, il est aussi le dessinateur de sa série ; et il fait partie de ceux qui réfléchissent à la meilleur manière de raconter en image une histoire. N'hésitant pas à s'affranchir de la couleur, voire à utiliser la bichromie, ou le format dit à l'italienne. Chaque mise en page, chaque case est pensée en terme de narration selon le contexte évoqué ou/et de personnage, et c'est un véritable plaisir de lecture. Les artistes qui s'occupent de la couleurs ne sont pas peu dans la réussite de cette bande dessinée : Phil Elliot, Craig Conlan, Erik Larsen, Eric Stephenson, Bill Crabtree. Un soin tout particulier est également apportée aux couvertures et au lettrage ....  


Toute cela au service d'histoires de qualité, toujours surprenantes, amusantes, pleines de suspense et de personnages "hauts en couleur", un univers qui mérite selon moi largement le détour ... il est d'ailleurs bien dommage qu'aucun éditeur hexagonal ne se soit penché sur cette série.   

Commentaires

  1. Faut vraiment que je m'atèle au boulot de Grist (que Nikolavitch m'avait fait découvrir) et que je lise ce que j'ai en retard (au moins 2 TPB de Kane - très bon aussi).

    RépondreSupprimer
  2. Bien dommage en effet.
    Est-ce que la série est disponible en TPB ?

    RépondreSupprimer
  3. Oui Mathieu, Kane est une excellente série (de polar noir), dommage que la tentative de l'éditeur La Comédie Illustrée, de la proposer en français ait tourné court. C'est un plaisir de te revoir ici.


    Oui, il me semble qu'elle est disponible entièrement (ou presque) en TPB.

    Merci de ton passage Zaït

    RépondreSupprimer
  4. "Jack Staff" est l'une des rares séries qui me donne encore l'impression de lire un comics. Je regrette juste que la parution erratique n'en facilite pas plus l'accès.

    RépondreSupprimer
  5. @ AlanBax ; effectivement la parution irrégulière dessert (un peu) cette excellente série. Mais je suis confiant, ce billet est l'un de ceux qui génère le plus de commentaire.

    À n'en pas douter c'est un signe ....

    Merci de ta visite en tout cas.

    RépondreSupprimer
  6. J'avais lu les premiers numéros de Jack Staff (ceux parus chez Dancing Elephant Press) et j'avais été captivé. Et ce billet me rappelle qu'il faut que je me degotte la suite, presto !
    En tout cas, il n'y a pas à tortiller : ils sont fort, ces Anglais !

    (Par contre, je trouve que le noir & blanc - avec quelques planches de-ci de-là en couleurs non-informatisées - convenait mieux au dessin de Grist...)

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations dont l'évidence paraît pour

Nebula-9 : The Final Frontier

... Nebula-9 est une série télévisée qui a connu une brève carrière télévisuelle. Annulée il y a dix ans après 12 épisodes loin de faire l'unanimité : un mélodrame bidon et un jeu d'acteurs sans vie entendait-on très souvent alors. Un destin un peu comparable à Firefly la série de J oss W hedon, sauf que cette dernière bénéficiait si mes souvenirs sont bons, de jugements plus louangeurs. Il n'en demeure pas moins que ces deux séries de science-fiction (parmi d'autres telle Farscape ) naviguaient dans le sillage ouvert par Star Trek dés les années 60 celui du space opera . Le space opera est un terme alors légèrement connoté en mauvaise part lorsqu'il est proposé, en 1941 par l'écrivain de science-fiction W ilson T ucker, pour une catégorie de récits de S-F nés sous les couvertures bariolées des pulps des années 30. Les pulps dont l'une des particularités était la périodicité ce qui allait entraîner "une capacité de tradition" ( M ich