Accéder au contenu principal

The Paybacks / Dark Horse

…. Le romancier et scénariste de BD (mais pas seulement) Alfred Bester raconte une bien belle histoire au sujet de George Horace Lorrimer, le redoutable rédacteur en chef du Saturday Evening Post.
Il a fait quelque chose de très audacieux en son temps dit-il, en publiant un roman en deux parties dont la première s’achevait au moment où une jeune femme emmenait un jeune homme chez elle à minuit pour un petit casse-croûte.
La seconde livraison s’ouvrait sur nos jeunes gens en train de prendre leur petit déjeuner ensemble dans l’appartement de la fille le matin suivant.

Des milliers de lettres indignées affluèrent au journal, et Horace Lorrimer fit imprimer une réponse ainsi libellée : « Le Saturday Evening Post n’est pas responsable de la conduite de ses personnages entre les épisodes publiés. » Ce qui fait dire à Bester que sans doute, nos héros de bandes dessinés menaient-ils des vies normales entre deux épisodes.
Batman se saoule la gueule et traque la femelle ; et Robin met le feu à la bibliothèque de son école pour protester contre une chose ou une autre.

C’est d’une certaine manière, cette perspective qu’envisagent les scénaristes Donny Cates & Eliot Rahal avec leur mini-série publiée par Dark Horse : The Paybacks.


Vous avez voulu devenir un super-héros mais vous ne pouviez acheter votre cape et votre masque ? Eh bien vous pouvez faire un prêt et acheter tous les gadgets que votre lutte contre le crime nécessite. Mais que faire lorsqu’il s’agit de rembourser votre « super-prêt » et que vous n’avez pas l’ombre d’un kopeck d’avance ? N’ayez pas peur notre équipe de recouvrement, The Paybacks, va vous aider …. Enfin si vous survivez. 
The Paybacks #1-4 

Scénario de Donny Cates & Eliot Rahal Dessin de Geoff Shaw Couleurs de Lauren Affe 
…. Pas de pages didactiques, la découverte de la minis-série The Paybacks se fait « sur le tas », au travers des différentes et nombreuses péripéties qui rythment l’histoire. 
Si certains personnages ne manqueront pas d’évoquer telle ou telle super-héros ayant marqué la déjà longue histoire du genre, il n’est pas vraiment question ici de pastiches tant les protagonistes de The Paybacks affirment assez rapidement leur personnalité propre au-delà des clins d’œil. 
Cela dit, certaines situations bénéficient indéniablement de l’effet pastiche et des clichés liés aux stéréotypes qui les accompagnent. 
Mais loin de parasiter la lecture elle procure un joli sentiment de connivence.
C’est d’ailleurs l’une des réussites de la mini-série, l’équilibre pas toujours évident entre l’humour et le drame, la légèreté et la « violence » ; les quatre numéros sont de ce point de vue une totale réussite, un travail de fildefériste. 

Car si The Paybacks joue sur le ressort humoristique, très rapidement en filigrane, puis de plus en plus clairement il apparaît que les deux scénaristes mettent en place des intrigues où le mystère et le suspense jouent un rôle tout aussi important. 
C’est l’un des aspects qui m’a immédiatement accroché. 
Je sors par ailleurs de quelques lectures de BD où l’idée même de sous-intrigues n’a visiblement pas effleuré les scénaristes qui les ont écrites (sans parler d’une caractérisation minimaliste), et lire une histoire comme The Paybacks, qui joue la carte des sub-plots, avec des personnages fortement caractérisés, capables à eux seuls et individuellement de porter une ou des histoires est très revigorant. 

Autre atout et non des moindres, Geoff Shaw le dessinateur et Lauren Affe la coloriste font des merveilles.
Le design de chaque personnage est très soigné, les scènes d’affrontement qui mettent souvent en scène beaucoup de personnage sont très lisibles. Geoff Shaw pour le dire rapidement, quintessencie le meilleur de Sean Murphy et de Bill Sienkiewicz en une substantifique moelle. 
Lauren Affe quant à elle participe astucieusement au storytelling, ainsi l’utilisation de trames « Benday » (ou l’équivalent numérique pour un tel rendu) pour signifier les flashbacks, et l'utilisation d'une large palette de couleurs, toujours utilisée avec beaucoup d’à propos, et sans jamais obscurcir la lisibilité des planches. 
Le soin de la partie artistique de l’entreprise témoigne de l’implication de chaque intervenant dans le processus narratif pour un résultat très au-dessus d’une bonne partie de la production actuelle.
…. Scénario prometteur et rendu artistique de la plus belle eau n’auront toutefois pas suffit à pérenniser l’aventure, et après quatre excellents numéros The Paybacks s’arrête. 

Pour refaire surface avec la même équipe créative ou presque, mais chez l’éditeur Heavy Metal. OUF !!!

(À suivre …. parce qu'elle le vaut bien)

Commentaires

  1. flute, tu me donnes envie alors que je ne comptait pas l' acheter après la déception de Crossover

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations dont l'évidence paraît pour

Nebula-9 : The Final Frontier

... Nebula-9 est une série télévisée qui a connu une brève carrière télévisuelle. Annulée il y a dix ans après 12 épisodes loin de faire l'unanimité : un mélodrame bidon et un jeu d'acteurs sans vie entendait-on très souvent alors. Un destin un peu comparable à Firefly la série de J oss W hedon, sauf que cette dernière bénéficiait si mes souvenirs sont bons, de jugements plus louangeurs. Il n'en demeure pas moins que ces deux séries de science-fiction (parmi d'autres telle Farscape ) naviguaient dans le sillage ouvert par Star Trek dés les années 60 celui du space opera . Le space opera est un terme alors légèrement connoté en mauvaise part lorsqu'il est proposé, en 1941 par l'écrivain de science-fiction W ilson T ucker, pour une catégorie de récits de S-F nés sous les couvertures bariolées des pulps des années 30. Les pulps dont l'une des particularités était la périodicité ce qui allait entraîner "une capacité de tradition" ( M ich