Couverture de Chris Moore |
Paru il y a plus de quinze ans déjà en français, je n’apprendrai donc sûrement rien à personne en disant que ce premier tome fait partie d’un très vaste univers littéraire, dont le cycle intitulé Le Livre Malazéen des Glorieux Défunts, auquel appartient le présent roman, se compose de pas moins de 10 romans. Cycle qui se rattache à d’autres cycles, dont certains écrits par Ian C. Esslemont. C’est donc à un projet particulièrement ambitieux auquel se sont attaqués les deux complices en jeux de rôles devenus également depuis romanciers.
Même à l’échelle de ce qui se fait souvent en fantasy, genre réputé pour ses cycles interminables. Parfois, pour ne pas dire souvent, au détriment de ce qu’on aimerait y trouver.
Cela dit, s’il est coutumier de reprocher aux auteurs de trop écrire ou d’écrire « trop long », on peut tout aussi bien inverser la proposition. À trop lire, les lecteurs ne s’usent-ils pas aussi ?
…. Aussi étonnant que ce cela puisse me sembler, Les Jardins de la Lune est le premier roman de Steven Erikson.
Réputé difficile, pas assez maîtrisé dit-on même, à tel point que les connaisseurs, du moins certain d’entre eux, recommandent de commencer* par le deuxième tome du cycle, Deadhouse Gates, plus abouti . Paru en français, et ce sera pour l’instant le dernier traduit, chez Calman-Levy, mais découpé en deux romans, intitulés respectivement : Les Portes de la Maison des Morts et La Chaîne des Chiens. Contournement facilité puisque l’ordre de parution ne suit pas la chronologie de l’univers en question. Deadhouses Gates ai-je lu, part sur une intrigue différente de celle de Les Jardins de la Lune, et ne la rejoint que plus tard dans le cycle.
…. À toute honneur tout seigneur, n’étant pas moi-même au fait de tout cela lorsque j’ai entamé ce premier tome, je ne l’ai pourtant pas lâché,
Plutôt enthousiaste de lire un roman où les très nombreux personnages prennent tous – ou peu s’en faut - une part active aux nombreuse intrigues qui s’y déroulent. En un mot comme en cent, je n’ai pas boudé mon plaisir.
Certes, on est plongé in medias res, et Erikson n’utilise pas de narrateur omniscient qui pourrait faire preuve de didactisme en nous expliquant ceci ou cela. Tout ce que l’on apprendra du monde dans lequel nous plongeons viendra des actions et des dialogues des personnages. Une technique qui si elle paraît moins faciliter l’accès dudit roman, implique d’autant plus le lecteur.
Heureusement, le rythme, la caractérisation, le dépaysement, les multiples rebondissements et le souffle épique, en un mot le contenu de l'ouvrage est à la hauteur de l’effort (relatif) demandé.
Autre point de satisfaction, la traductrice Marie-Christine Gamberini, et l’éditeur ont choisi de traduire la plupart des noms des personnages, des lieux et des villes. Comme on sait, en fantasy les noms propres sont autant de noms programmatiques. Et si certains sonnent bizarrement en regard du vocabulaire qui est le nôtre, j’y ai pour ma part trouvé un facteur augmentant le cognitive estrangement cher à Darko Suvin [Pour en savoir +], et sensation qui m’est nécessaire dans ce type de lecture.
…. En définitive, ce premier tome est non seulement une très belle réussite, qui peut par ailleurs rester sans suite si on le désire, tout en donnant furieusement envie de retourner dans cet extraordinaire univers. Cerise sur le gâteau, des rumeurs venues des confins assurent que la suite de la série serait en bonne voie pour se voir traduire en langue hexagonale.
C'est ce que j'appelle une très bonne nouvelle !
_________________
* Démarche que je ne recommande pas du tout, ayant commencé justement ce second roman depuis mon billet, puisqu'il indique une ou deux choses assez dommageables sur le premier. C'est rapide, mais c'est là quand même.
• On pourra avec profit lire un autre billet critique chez Lutin82 [Pour en savoir +], ou encore chez Apophis [Pour en savoir +], voire chez Herbefol [Pour en savoir +]. Des billets beaucoup plus riches que ma propre recension.
Commentaires
Enregistrer un commentaire