A ghost story – titre éminemment programmatique – explore le versant
intimiste du film de fantôme avec un changement de
perspective singulier : c’est l’errance du revenant que s’attache à
dépeindre cette chronique à la dimension existentielle prononcée.
En
partant de cette représentation ancrée dans l’imaginaire collectif, à
savoir un spectre matérialisé par une silhouette nappée d’un drap et de deux
orifices noirs pour toute expression, le réalisateur et scénariste David Lowery
déploie cet observateur silencieux comme témoin du fil de l’écoulement du temps
au sein de l’espace restreint à la dernière demeure du défunt où s’entremêlent
diverses strates d’existences.
Le
film se pare d’une langueur mélancolique qui s’insère dans la durée de longs plans
séquences, l’étirement de l’instant capturant la moindre variation subtile des sentiments
qui agitent les personnages ; un enlacement fatigué se mue ainsi en une
discrète étreinte affectueuse le temps d’une scène où la tendresse devient
palpable. Quant à la durée de moments charnières succède le défilement du
quotidien puis de vécus disparates, un vertige métaphysique saisissant s’empare
de l’histoire par le biais d’une mise en scène éthérée significative où chaque plan de coupe, chaque répétition au sein du cadre,
chaque basculement entre champ et contre-champ, devient autant d’incursions possibles
dans les méandres du temps qui passe.
Qu’il
s’agisse du filmage au format 4/3, de l’agencement effectué
pour les (sur-)cadrages, de la texture sonore qui met les sens à contribution ou
des compositions musicales, voire l’absence d’icelles, qui figurent les tourments
intérieurs (le départ en voiture de Rooney Mara serre le cœur), l’expérimentation
formelle à l’œuvre résonne d’un puissant spectre de sensations à même
d’emporter le spectateur dans son sillage.
Cette
expérience sensorielle aurait été totale sans ce monologue assénant sur le mode de la condescendance ce que le film s’évertue à bâtir
patiemment par l’image pendant son déroulement.
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