.... Écureuillette, personnage relativement mineur de l'éditeur étasunien Marvel, inventé par Steve Ditko, qu'on ne présente plus et par Will Murray, grand spécialiste de la littérature publiée dans les pulp magazines, et par ailleurs romancier, notamment des aventures de L'Implacable* (The Destroyer en V.O), ; Écureuillette donc disais-je, a les honneurs d'un graphic novel, traduit par la branche hexagonale de l'éditeur Panini, dans une collection justement nommée ...... « Graphic Novel ».
Évacuons d'ores et déjà un malentendu.
Un graphic novel, outre-Atlantique, est ce qu'on appelle en France un album.
Autrement dit une histoire qui paraît d'un seul tenant mais surtout qui a été pensé comme tel. Sans avoir été au préalable commercialisée mensuellement, mode de publication encore largement dominant aux États-Unis, notamment lorsqu'il s'agit d'histoires de super-héros. Un graphic novel peut, le cas échéant, faire partie d'un projet publié de manière périodique [Pour en savoir +].
Contrairement à ce que pourrait laisser penser une traduction littérale, un "roman graphique" n'est pas forcément plus littéraire, ou plus complexe, qu'un périodique.
Pas plus qu'il n'est, par le miracle de son format, plus novateur ou d'avant-garde.
Ainsi Watchmen, que beaucoup de lecteurs tiennent pour un chef-d’œuvre du 9ème art, et qui nonobstant cette auréole a été, et est encore une bédé très novatrice, a été en son temps mensualisée sous la forme d'une maxi-série de 12 fascicules. From Hell, toujours écrit pas Alan Moore n'est pas plus un roman graphique, alors que c'est aussi un chef-d’œuvre d'une complexité incroyable, et qui coudoie franchement ce que la littérature a à offrir de mieux.
Cela dit, pas besoin d'être un chef-d’œuvre, ni de caresser les sommets littéraires pour donner entière satisfaction lorsqu'on paraît dans le secteur du divertissement de masse.
Est-ce dès lors, le cas de l'album de Ryan North & d'Erica Henderson ?
Eh bien rien n'est moins sûr.
.... Cela n'a rien à voir avec le personnage en lui-même. Écureuillette n'est pas plus ridicule qu'un adolescent mordu par une araignée radioactive, ni qu'un astronaute dont la peau se transforme en brique orange. Steve Gerber a inventé dans les années 1970, un simili Conan le « barbare », qui prend forme grâce à du beurre de cacahuètes, et rien dans les récits où il apparaît ne le montre ridicule.
Les scénaristes de bédé qui œuvrent dans le genre, pour paraphraser Michel Audiard, ça ose tout, c'est même ce qui fait leur charme. Le domaine des super-héros, sous-genre de la fantasy, estaussi d'abord celui de la démesure et de l'incroyable.
Une jeune femme affublée d'une queue préhensible en fourrure, aux incisives proéminentes de rongeur et agile comme un sciuridé, avec en bonus une force peu commune, a toutes les chances de passer inaperçue (ou presque) dans le New York d'encre et de papier de la « Maison des Idées » arpenté qu'il est, par toute une théorie de personnages plus bizarres les uns que les autres.
Tout est une question de traitement.
Et c'est là que le bât blesse.
Si on passe le ton moqueur, l'ironie acerbe et le simplisme du scénario, hormis si cet album s'adresse aux jeunes enfants, ce que le dispositif narratif dément (qui montre par ailleurs que le scénario est d'abord conscient d'en être un), la vraie pierre d'achopement de l'histoire estson inaptitude l'obstruction qu'elle fait au déclenchement de la suspension volontaire d'incrédulité nécessaire au lecteur. Tout est fait pour qu'on reste à distance du récit, pour qu'on n'oublie jamais qu'on est en train d'en lire un.
.... Et force est de constater, que rester ainsi à la périphérie de l'histoire d'Écureuillette contre l'univers Marvel, donne à sa finalité prescriptive un ton qui n'a rien d'enfantin.
Conscients de la naïveté dont ils sont les messagers, Ryan North & d'Erica Henderson, respectivement scénariste & dessinatrice, rient sous cape, jouent à en être, mais sans être dupes de l'inanité de leur propre scénario : « la bédé de super-héros est juste ringarde, montrons à quel point elle l'est, ça plaira sans aucun doute à ceux qui n'en lisent pas. Et ne veulent pas en lire. »
Tel est en substance l'impression qui me reste après avoir lu cet album ; qui, comble d'un certain snobisme, est préfacé par deux collaborateurs du prestigieux New York Times.
Et si je me suis trompé, alors c'est peut-être encore pire.
_____________
* Personnage littéraire inventé par Richard Sapir & Warren Murphy, qui a aussi connu une exploitation en salle au travers d'un film intitulé : Remo sans arme et dangereux.
Évacuons d'ores et déjà un malentendu.
Un graphic novel, outre-Atlantique, est ce qu'on appelle en France un album.
Autrement dit une histoire qui paraît d'un seul tenant mais surtout qui a été pensé comme tel. Sans avoir été au préalable commercialisée mensuellement, mode de publication encore largement dominant aux États-Unis, notamment lorsqu'il s'agit d'histoires de super-héros. Un graphic novel peut, le cas échéant, faire partie d'un projet publié de manière périodique [Pour en savoir +].
Contrairement à ce que pourrait laisser penser une traduction littérale, un "roman graphique" n'est pas forcément plus littéraire, ou plus complexe, qu'un périodique.
Pas plus qu'il n'est, par le miracle de son format, plus novateur ou d'avant-garde.
L'une des |
Écureuillette ou l'ironie portée à son paroxysme |
Est-ce dès lors, le cas de l'album de Ryan North & d'Erica Henderson ?
Eh bien rien n'est moins sûr.
Sans commentaire |
Les scénaristes de bédé qui œuvrent dans le genre, pour paraphraser Michel Audiard, ça ose tout, c'est même ce qui fait leur charme. Le domaine des super-héros, sous-genre de la fantasy, est
Une jeune femme affublée d'une queue préhensible en fourrure, aux incisives proéminentes de rongeur et agile comme un sciuridé, avec en bonus une force peu commune, a toutes les chances de passer inaperçue (ou presque) dans le New York d'encre et de papier de la « Maison des Idées » arpenté qu'il est, par toute une théorie de personnages plus bizarres les uns que les autres.
Tout est une question de traitement.
Histoire de bien poser l'horizon d'attente de l'histoire, les auteurs insèrent après quelques pages seulement, une pause dans le déroulement du récit |
Si on passe le ton moqueur, l'ironie acerbe et le simplisme du scénario, hormis si cet album s'adresse aux jeunes enfants, ce que le dispositif narratif dément (qui montre par ailleurs que le scénario est d'abord conscient d'en être un), la vraie pierre d'achopement de l'histoire est
Conscients de la naïveté dont ils sont les messagers, Ryan North & d'Erica Henderson, respectivement scénariste & dessinatrice, rient sous cape, jouent à en être, mais sans être dupes de l'inanité de leur propre scénario : « la bédé de super-héros est juste ringarde, montrons à quel point elle l'est, ça plaira sans aucun doute à ceux qui n'en lisent pas. Et ne veulent pas en lire. »
Tel est en substance l'impression qui me reste après avoir lu cet album ; qui, comble d'un certain snobisme, est préfacé par deux collaborateurs du prestigieux New York Times.
Et si je me suis trompé, alors c'est peut-être encore pire.
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* Personnage littéraire inventé par Richard Sapir & Warren Murphy, qui a aussi connu une exploitation en salle au travers d'un film intitulé : Remo sans arme et dangereux.
Donc un album réalisé dans un esprit assez putassier. Pas indispensable.
RépondreSupprimerPas indispensable, non.
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