« Assassiner un professeur parce qu'il enseignait n'était pas arrivé depuis longtemps dans ce pays. Était-ce d'ailleurs jamais arrivé ? » se demande Riss en janvier 2021.
Basé essentiellement sur le rapport officiel de l'Inspection générale de l'Éducation, du Sport et de la Recherche et sur quasiment tout ce qu'a pu lire David di Nota sur le sujet, « J'ai exécuté un chien de l'enfer » revient sur les jours qui ont précédé la décapitation de Samuel Paty, et déroule une contre-enquête sobre et implacable.
Son récit met notamment au jour la confiscation de l'offense par quelques personnes seulement, qui prétendent parler aux noms d'une communauté religieuse entière. Cette prétention était au demeurant déjà à l’œuvre lorsque le quotidien danois Jyllands-Posten avait publié une enquête sur l'auto-censure en 2005, et même avant lorsque Salman Rushdie publia Les versets sataniques.
Sans que David di Nota n'ait besoin d'instruire à charge, la relation des faits suffit, le comportement de la hiérarchie de Samuel Paty, et celui de certains de ses collègues est accablant. Pour eux !
Difficile de croire en effet que personne dans l'établissement où il travaillait n'ait su que le témoignage de l'élève qui mit le feux aux poudre ne pouvait être vrai puisqu'elle n'avait pas assisté au cours en question.
Lequel n'était d'ailleurs pas une lubie de Samuel Paty, mais bien prévu par le programme. Est-il en effet raisonnable de penser qu'on puisse illustrer la liberté d'expression aujourd'hui, en montrant des caricature de Louis-Philippe ?!
D'autant que le cours, selon les témoignages de ceux qui y ont participé, s'était très bien passé.
Ce qui n'empêchera pas un député français d'expliquer, presque un an jour pour jour après l'assassinat de l'enseignant du collège du Bois d'Aulne de Conflans-Sainte-Honorine, qu'à son époque l’hebdomadaire « Charlie Hebdo était réservé aux adultes ».
Ce qui transparait aussi dans au fil des 38 courts chapitres du livre de David di Nota, c'est la lucidité de Samuel Paty ; et sur la campagne de déstabilisation dont il faisait l'objet, et sur le soutient de sa hiérarchie à la vindicte dont il était la victime.
On retiendra de ce triste exemple, par une cruelle inversion , la mécanique à l’œuvre qui fait de facto d'une offensée, une victime : « Montrer du doigt, c'est la certitude d'être du bon côté du doigt ».
Ce que s'abstient de faire David di Nota tout au long de son récit.
« Samuel Paty a du mal à percevoir qu’il a fait une erreur », écriront les deux rapporteurs dans leur rapport officiel, qui paraîtra le 3 décembre 2020. Pour rappel, l'exécution de Samuel Paty a eu lieu le 16 octobre 2020.
Comme le souligne Jacques Julliard dans son éditorial de 22 novembre pour l’hebdomadaire Marianne : « Aujourd'hui, dans la France de 2021, la parole enseignante a cessé d'être libre, et c'est une honte. ».
Et la mauvaise nouvelle c'est qu'elle n'est pas seule à l'être.
Le livre de David di Nota nous dit cependant que certains n'ont pas abdiqué, ils méritent qu'on se souviennent d'eux.
Et il le dit dans une langue limpide, et courageuse.
Bon article. Je partage.
RépondreSupprimerMerci.
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