Délinquant juvénile en Ukraine, poète underground sous Brejnev, loser magnifique à New York, romancier un temps adoubé par Saint-Germain-des-Prés, mercenaire en Serbie, chef de partie emprisonné sous Poutine, Edouard Limonov est, pour le meilleur et pour le pire, un des derniers opposants au pays de l'homme de fer. Portrait d'un aventurier, et de la Russie réelle.
... C'est par cet incipit que commence le récit d'Emmanuel Carrère pour le premier numéro du magazine XXI, paru en 2008 ; si la personnalité et le parcours esquissés avaient éveillé mon intérêt, au fil de la lecture s'y est ajouté le plaisir de lire un récit où l'auteur loin, très loin de se retrancher derrière une objectivité factice s'incarnait littéralement et démontrait, s'il en était besoin, que des faits quels qu'ils soient percolent toujours au travers du filtre personnel de celui qui écrit.
Trois ans plus tard Emmanuel Carrère publie un opus de près de 500 pages sur Edouard Limonov (chez P.O.L).
Photographié en 2010 à bord d'un bus de la police (Reuter) |
1994, avec Natacha (?) |
... Tom Wolfe qui vient alors d'inventer au milieu des sixties le Nouveau Journalisme, déplore que le roman ne joue plus son rôle social ; qu'il ne soit plus comme à sa grande époque, celle de Stendhal, de Balzac, de Dickens, le "miroir qu'on promène le long d'un chemin". Cinquante ans plus tard, avec Limonov Emmanuel Carrère devient "l'historien des modes et des mœurs du temps, le greffier de son siècle changeant.". Et à l'instar de Tom Wolfe pour Acid test "écrit en léger différé [..]", non seulement Carrère ne va pas vivre les aventures de Limonov (forcément) mais il va se baser essentiellement sur les livres de l'Ukrainien pour son récit et non pas, comme on pourrait s'y attendre sur de multiples entretiens.
En outre Carrère n'est pas seulement l'auteur du récit, il en devient à plusieurs reprises un personnage à part entière (souvent dans des situations cocasses), de plus il propose sa propre expérience en regard des évènements auxquels participe Limonov. Du reste en tant qu'auteur Emmanuel Carrère interpelle directement, et à plusieurs reprise son lecteur, il n'hésite pas non plus à mettre en scène à proposer une sorte de work in progress ; ces choix donnent un rythme et un ton étrangement captivants à son livre. Quasi hypnotique, en tout cas particulièrement immersif.
Une magnifique biographie, et un éclairage précieux sur le 20ième siècle.
Bonjour Artemus !
RépondreSupprimerTout d'abord, j'apprécie toujours autant de venir sur ton blog afin de m'initier, mieux connaitre, voire découvrir à des sujets et des centres d'intérêts que je ne maitrise pas ou que je ne connais pas encore.
Je suis content de ce que j'aime déjà mais la curiosité de ce qui reste à découvrir m'intéresse bien plus !
Par ailleurs, je te remercie pour ton très sympathique message d'encouragement sur mon blog, le Royaume des avis. Hélas, mon intérêt pour mon blog s'est proprement éteint et je doute m'y remettre prochainement.
La publication de cet article sur Mr Manatanne est une erreur qui m'a bien surpris et j'ai dû l'effacer...
Par ailleurs toujours, nous nous sommes croisés dans un autre lieu du net, disons caverneux, où tu m'avais justement renseigné sur l'auteur de l'article relatif à Go Nagai. Auteur dont je supposais qu'il s'agissait de Jean Wacquet, alors que je sais grâce à toi qu'il s'agit réellement de Jérôme Wicky.
Erreur pour erreur, j'avais beaucoup aimé et apprécié cet article en son temps, et j'avais pour (faux) souvenir que tu en étais l'auteur...
Amicalement !
Bastien Ayala.
Tu es toujours le bienvenu ici, gospodin.
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