Accéder au contenu principal

Traqués [Adrian McKinty / Pierre Reignier]

La couverture est un condensé de ce qui nous attend, comme souvent lorsqu’il s’agit d’un roman dit de (mauvais) genre. Le titre, « Traqués », très explicite ; et l’illustration nous plonge déjà dans ce qu’on suppose (avec raison) être un survival. Doublé d’un mystère, si l'on est attentif. 
Je poursuivrai mon autopsie en invitant Bryan Edward Hill, scénariste de bande dessinée et script doctor, qui est à l’origine d’une théorie. 
            Idéalement dit-il, dans un récit de (mauvais) genre « vous vous ne devriez pas avoir besoin du monstre, du voleur, du robot, etc. pour que votre conflit dramatique tienne la route. » Il doit y avoir, ajoute-t-il, un sérieux conflit dramatique avant même que ne soit introduit l'élément qui fera du récit en question un film de Sf, une BD de Fantasy ou comme ici un survival novel. Alors rassurez-vous, c’est bien le cas. 
Même si celui-ci n’est pas apparent de prime abord. 
            Second invité, madame Linda Williams, professeure émérite à l'Université de Californie Berkeley dans les départements de cinéma et médias, et de rhétorique. Auteure notamment de Hard Core1999 , sous-titrée « Power, Pleasure and the Frenzy of the Visible », dans lequel elle traite du cinéma pornographique ; et propose un moyen qui permet de dire si telle ou telle histoire ressortit aux (mauvais) genres. 
Tout d’abord, tout récit de Western, de Fantasy, de Polar ou de Sf (liste non exhaustive) propose des éléments que vous vous attendez à trouver en vous y plongeant. Vous ne venez pas pour eux, mais pour l’histoire, les personnages, un savoir-faire, etc.., mais leur absence vous feront vous récrier. Ces éléments ne sont évidemment pas interchangeables, mais propres à chaque (mauvais) genre. Il ne vous viendrez pas à l'idée de maudire Le Parrain en réclamant des chansons. Ce qu'il serait par contre légitime de faire pour Chantons sous la pluie.
En outre, ces figures incontournables doivent être indispensables à l’histoire. 
Si elles ne sont là que pour faire tapisserie, ou si elles se produisent en cours de route sans véritable incidence sur l'histoire, alors nous ne sommes pas devant un (mauvais) genre. 
Rassurez-vous, « Traqués » est définitivement un survival
Mais est-il bon ? 
            Eh bien à dire vrai, il met un peu de temps à se mettre en route. Si l’élément déclencheur arrive assez tôt, et si la tension est là encore plus tôt, on doit attendre un certain temps avant que le gibier ne prenne les mesures que l’on attend. C'est d'autant plus frustrant qu'un prologue nous met l'eau à la bouche.
Cela dit, une fois prises les « bonnes » décisions, ça dépote sévère. 
En fin de compte « Traqués » est un divertissement qui ne déçoit pas, mais qui aurait gagné à mettre le starter au démarrage. 
_________
Je voudrais remercier Neil Gaiman, qui dans son ouvrage Vu des pop cultures (traduction de l'estimé Patrick Marcel), cite la théorie de Linda Williams, avec force exemples.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Triple frontière [Mark Boal / J.C. Chandor]

En même temps qu'un tournage qui devait débuter en 2011, sous la direction de K athryn B igelow, Triple frontière se verra lié à une tripotée d'acteurs bankables : S ean P enn, J avier B ardem, D enzel W ashington. Et même T om H anks. À ce moment-là, le titre est devenu Sleeping dogs , et d'autres noms circulent ( C hanning T atum ou encore T om H ardy). Durant cette période de valses-hésitations, outre M ark B oal au scénario, la seule constante restera le lieu où devrait se dérouler l'action. La « triple frontière » du titre est une enclave aux confins du Paraguay , du Brésil et de l' Argentine , devenue zone de libre-échange et symbole d'une mondialisation productiviste à fort dynamisme économique. Le barrage d' Itaipu qui y a été construit entre 1975 et 1982, le plus grand du monde, produirait 75 % de l’électricité consommé au Brésil et au Paraguay . Ce territoire a même sa propre langue, le « Portugnol », une langue de confluence, mélange d

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Big Wednesday (John Milius)

Une anecdote circule au sujet du film de J ohn M ilius, alors qu'ils s’apprêtaient à sortir leur film respectif ( La Guerre des Etoiles , Rencontre du Troisième Type et Big Wednesday ) G eorge L ucas, S teven S pielberg et J ohn M ilius  auraient fait un pacte : les bénéfices de leur film seront mis en commun et partagés en trois. Un sacré coup de chance pour M ilius dont le film fit un flop contrairement aux deux autres. Un vrai surfeur ne doit pas se laisser prendre au piège de la célébrité  Un vrai surfeur ne doit pas se sentir couper des siens. Il ne doit pas courir derrière les dollars, ni gagner toutes les compétitions. [..] M idget F arrelly champion du monde de surf 1964  ... Big Wednesday est l'histoire de trois jeunes californiens dont la vie est rythmée par le surf ; on les découvre en pleine adolescence au cours de l'été 1962, et nous les suivrons jusqu'à un certain mercredi de l'été 1974.   L'origine du surf se perd dans la nuit des