Dernière série télévisée en date du prolifique Taylor Sheridan, et je ne parle pas de ses futurs projets comme 1923, qui se déroulera chronologiquement parlant dans l'univers de Yellowstone, juste avant cette dernière, et après 1883, ni de Lioness ; « Mayor of Kingstown » s'intéresse au monde carcéral.
Kingstown, une ville fictive du Michigan, dépend de sa prison en termes d'emplois. Mitch McLusky (Kyle Chandler) en est le « maire », un poste qui n'a absolument rien d'officiel puisqu'il correspond peu ou prou à celui de courtier, d'intermédiaire, entre les détenus, leurs gangs à l'extérieur, la police locale (considérée elle aussi comme un gang), la justice, les familles des détenus. Et d'une manière plus générale, tout ce qui a un rapport avec ladite prison.
Mitch est chargé de garantir « la paix dans la vallée », autrement à l'intérieur du zonzon ; mais aussi à l'extérieur puisque ceux qui en sortent sont remplacés par ceux qui y entrent. D'autant que le bizness ne souffre d'aucune interruption.
Mitch McLusky est secondé par son frère Mike (Jeremy Renner), qui a lui-même été incarcéré dans cette prison, où il a par ailleurs occupé un poste de caïd dans le gang des Aryens.
États-Unis d'Amérique obligent, la race, la couleur de peau et la nationalité fragmentent en autant de fiefs l'humanité de Kingstown et de sa prison.
L'idée de cette série date d'au moins dix ans.
À l'époque Hugh Dillon (qui joue le rôle de l'inspecteur/ lieutenant Ian Ferguson) est coaché par Taylor Sheridan pour améliorer son jeu d'acteur. Sheridan n'a alors vendu aucun scénario, et sa propre carrière d'acteur est alors en demi-teinte.
Dillon et Sheridan en viennent naturellement à parler de ce qu'ils aimeraient faire, et le premier décrit au second l'endroit d'où il vient, une ville qui s'appelle Kingston (mais pas Kingstown), sise dans l'Ontario, connue pour avoir abrité jusqu'à 10 pénitenciers, dont Millhaven, classé en « sécurité maximum ».
Un endroit extrêmement dépendant de la manne carcérale donc, laquelle n'était pas sans déteindre sur ceux qui en vivaient, ou ceux qui habitaient aux alentours.
La société décrite dans les dix épisodes de cette première saison, est dure. Aussi bien à l'intérieur de la prison qu'à l'extérieur. Et Mike McLusky l'est aussi.
Il ne se fait aucune illusion sur sa fonction, ni sur ceux avec qui il traite. De fait, la série est très violente. Si on assiste aux tabassages et aux meurtres attendus, on y voit aussi une violence d'atmosphère qui par ailleurs dégénère souvent assez rapidement. De plus, Sheridan ne nous épargne pas l'ultime étape de ce milieu, à savoir la peine de mort.
Un épisode en propose même vision commentée (grâce à un habile élément dramatique), et saisissante.
Très dynamique, cette saison s'attache à décrire plusieurs intrigues simultanées, ceci expliquant cela, parfois sur le long terme, d'autres fois plus brèves. Mais toutes pèsent, d'une manière ou d'une autre, sur la totalité du show.
Sheridan & Dillon peuvent aussi compter sur une distribution trois étoiles ; tous les acteurs mouillent la chemise et donnent à leur rôle respectif l'épaisseur requise.
Par exemple George Tchortov, qui a certes un rôle récurent mais en définitif très secondaire (il est l'homme de main du puissant Milo Sunter), apporte à la série un verni (de violence) qu'elle n'aurait pas si Tchortov n'était pas à sa place.
Sheridan joue aussi sur nos (supposée) attentes.
Comme dans le premier épisode par exemple, qui n'est pas sans rappeler d'ailleurs celui de Yellowstone ; mais aussi un peu plus tard lorsqu'il prend le contrepied de certains clichés. Ainsi, lorsque est introduite (sans jeu de mots) Iris (Emma Laird), sensé attendrir Mike. Une sous-intrigue dont je craignais qu'elle emprunte tous les lieux communs du genre, et qui se révélera en fin de compte intense et ingénieuse.
Le téléspectateur attentif remarquera aussi quelques clins d'œil, comme les panneaux de rues dont les patronymes ne sont pas un hasard. Il sourira sûrement aussi lorsque Mike McLusky (alias Jeremy Renner) achètera un arc.
Si je récapitule, « Mayor of Kingstown » est une série très bien écrite, originale, disposant d'une distribution haut de gamme. En sus, elle utilise toute une gamme d'éléments sociaux & sociétaux dont aucun ne nous est totalement étranger, et sur lesquels on peut réfléchir (si on veut).
Rien qui ne soit totalement nouveau venant de la culture de masse, ainsi même l'originalité n'est pas un parti pris inédit (heureusement d'ailleurs), mais lorsque c'est très bien fait, comme ici, je ne manque pas de me réjouir !
(À suivre .........)
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