« Butcher Baker » aurait pu se contenter d'avoir le classicisme d'un lettre d'amour au (mauvais) genre super-héroïque, cependant écrite par un Peter Punk© survolté à l'énergie œdipienne toujours intacte, si son dessinateur n'avait pas choisi de muer à l'occasion d'un projet légèrement antérieur (The Homeland Directive2011), et de garder la substantifique moelle de cette métamorphose artistique pour celui-ci.
Jeune scénariste américain aux dents longues repéré à la fin des années 1990, Joe Casey ne tarde pas à travailler sur des séries d'envergure pour les deux plus puissants éditeurs étasuniens : X-Men et Superman, par exemple.
Le marché de la BD outre-Atlantique étant ce qu'il est, il ne tarde pas non plus à écrire des histoires dont il n'est plus seulement le prestataire de luxe mais leur propriétaire (ou plus certainement leur copropriétaire) chez des éditeurs qui le lui permettent.
Dont justement « Butcher Baker » publiée par Image Comics™.
Le personnage éponyme est donc un super-héros grim & gritty comme l'industrie de la BD américaine a su en produire à partir des années 1980. Un personnage qui d'ailleurs ne manquera pas d'évoquer l'un d'entre eux aux amateurs qui ont lu la maxi-série Watchmen.
Le personnage éponyme est donc un super-héros grim & gritty comme l'industrie de la BD américaine a su en produire à partir des années 1980. Un personnage qui d'ailleurs ne manquera pas d'évoquer l'un d'entre eux aux amateurs qui ont lu la maxi-série Watchmen.
Or donc, goûtant une retraite faite de débauche et de luxure, Butcher Baker le « redresseur de torts » en est tiré par deux personnages qui donnent immédiatement le ton de ce que sera cette aventure.
Il s'agit en effet de Dick Cheney, notamment vice-président des États-Unis entre janvier 2001 et janvier 2009 dont la réputation n’est plus à faire, et de Jay Leno un présentateur de télévision dont l’humour et la satire ont été le fonds de commerce.
La mission est simple : charge à Butcher Baker de détruire une prison de super-vilains. Sans qu'on puisse remonter jusqu'à eux.
Forcément tout ne se déroulera pas sans accrocs.
Si Joe Casey livre un scénario solide, cornaqué par des personnages hors-normes, comme on est en droit d'en attendre d'un récit de super-héros. Et plus encore s'agissant d'un scénariste qui a construit une partie de sa réputation grâce à son goût de la provocation (par exemple l'un des super-vilains de la présente histoire s'appelle Jihad Jones), sans Mike Huddleston « Butcher Baker » n'aurait pas dépassé la lettre d'intention. Ce qui aurait été, par les temps qui courent, déjà une belle réussite.
Avec le dessinateur Mike Huddleston ce n'est pas mentir que de dire que l'écriture de cette aventure se conjugue à l'aventure d'une écriture. Ses dessins, son storytelling exhaussent à la puissance10 le scénario de Casey, qui ne manque cependant pas de qualités. Quand bien même s'agit-il de bande dessinée, sa lecture s'apparente en tout point à l'effet que produirait un dessin animé de Chuck Jones sur n'importe quel spectateur. Parler d'immersion reste très en-dessous de ce que le travail de Huddleston procure, je dirais que l'effet est plutôt de l'ordre de la noyade.
Simple, le scénario n'en est pas moins sincère. Joe Casey s'est, à l"époque de la promotion de la série, répandu en déclarant dans plusieurs entretiens que la majorité de ce que produisait les éditeurs en matière d'histoires de super-héros était d'un ennui des plus mortel, et que sa série avait l'ambition de se placer résolument du côté du remède.
Force est de constater qu'il ne s'agissait pas de vantardise.
Si toutes les histoires de super-héros étaient de l'acabit de Butcher Baker on risquerait des ruptures d'anévrisme en pagaille, la vie éditoriale du (mauvais) genre étant ce qu'elle est, Butcher Baker tient donc plus du chef-d’œuvre nostalgique & postmoderne inattendu que du mass-murder.
À découvrir chez Ankama™, traduction d'Astrid Mélite pour la V.F.
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