The Endless Summer
Durant l’été 1984 ; et si on en croit le titre de l’album et la carte qui y figure - un corps va être découvert dans Pelican Road.
S’ajoute en guise de préambule supplémentaire, une dramatis personae de neuf personnages (comme autant de suspects / victimes ?).
Ce nouvel album du duo Brubaker / Phillips (auquel s’adjoint Jacob Phillips au poste de coloriste) emprunte, comme le déclare le scénariste dans une postface (qui agrémente désormais souvent son travail), aux livres de poche (paperbacks) de l’éditeur étasunien Dell Books™ ; à la fois une carte et comme précisé - une liste des personnages auxquels nous auront affaire.
Exercice de style donc, qui tournera à l’avantage du lecteur.
Paperback Fiction
En 1943 l’éditeur de romans de poche, lesquels sont appelés paperbacks aux U.S.A. (et qu’Ed Brubaker persiste à appeler « pulp books »), Dell™ commercialise les siens avec en quatrième de couverture une carte (un plan, ou même le dessin d’une scène de l'histoire qui précède).
Laquelle carte deviendra une marque de fabrique, à tel point que ces romans sont désormais qualifiés de «Mapback » (contraction de map - carte, et donc de paperback). Et très recherchés.
On y trouvait aussi, souvent, donc une liste de personnage ; comme celle que propose
« Where the Body Was ».
À ce stade il est facile d’imaginer que nous allons lire un whodunit des plus classiques !
L’Effet Rashōmon
C’est sans compter sur la roublardise du natif de Bethesda (MD) qui raconte cette histoire à l’aide d’une narration non linéaire, dans laquelle les points de vue des neuf personnages de la dramatis personae ne sont pas forcément concordants.
Un canevas narratif popularisé par le film Rashōmon d’Akira Kurosawa, mais que l’on doit au nouvelliste japonais Ryūnosuke Akutagawa dont deux des histoires (Rashōmon & Dans le fourré) inspirèrent le film de 1950.
Fifty Shades of 1984
« Where the Body Was » est aussi (et surtout) une romance comics, c’est-à-dire une bande dessinée de (mauvais) genre où les histoires d’amour occupent une place prépondérante, et font avancer l'histoire (Cf. Linda Williams).
C’est aussi, pour les personnages, et visiblement pour Ed Brubaker également ; une plongée nostalgique au cœur de cet été 1984.
En effet, si les points de vue des personnages s’organisent autour de ce fameux été, ils nous parviennent de plus tard. De parfois bien plus tard.
Et c’est, pour certains d’entre eux, l’occasion d’un bilan nostalgique.
En outre, cette histoire accumule les marottes du scénariste à un point où il n’est pas interdit d’y voir un peu d’autobiographie (?).
Oui mais, et le corps alors ?
Eh bien justement, « Where the Body Was » est une histoire si captivante qu’on en oublierait presque de se poser la question. Ce qu’Ed Brubaker, bien conscient de la maîtrise dont il fait preuve ici, soulignera dans un épilogue matois.
Probablement l’un des meilleurs scénarios du bonhomme, aidé par son talentueux comparse préféré et le fils de ce dernier, pour au final donner un album exceptionnel (dans une carrière qui en compte déjà pas mal) !
Bientôt chez Delcourt™, je pense.
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