"Je suis frappé de terreur par mon corps,
cette matière à laquelle je suis attaché m'est devenue
si étrange. [...]
Quel est ce Titan qui a pris possession de moi ?"
The Maine Woods - Henri David Thoreau
... Si les années 50 montrent clairement une surenchère entre les États-Unis et l'U.R.S.S du côté de la course à la bombe, la guerre froide établit également de nouveaux fronts tant sur le théâtre culturel (Voir à ce sujet Qui mène la danse de Frances Stonor Saunders) que sur le plan sportif.
Absents des précédents Jeux Olympiques, les Soviétiques font une entrée fracassante à ceux d'Helsinki en 1952 en se classant deuxième nation en nombre de médailles, derrière les U.S.A. Et pour cause ...
L'équipe soviétique de ces Jeux est la première à avoir inclus une "approche pharmacologique" dans la préparation de ses athlètes.
L'équipe soviétique de ces Jeux est la première à avoir inclus une "approche pharmacologique" dans la préparation de ses athlètes.
"Je sais qu'ils utilisent des hormones pour augmenter leur force"
Bob Hoffman à l'Associated Press
Novembre 1961 |
... Lors des jeux Olympiques d'Helsinki, en 1952, les haltérophiles soviétiques remportent sept médailles, à la stupéfaction quasi générale. [..] Deux ans plus tard, aux championnat sdu monde d'haltérophilie à Vienne, Bob Hoffman et John Ziegler, médecin responsable de l'équipe américaine, rencontre un médecin russe. Celui-ci leur confirme que certains haltérophiles soviétiques ont subi une cure de testostérone. Dés son retour aux Etats-Unis, John Ziegler teste sur lui-même, ainsi que sur Bob Hoffman et deux haltérophiles, Jim Park et Yaz Kuzahara, de faibles quantités de ce produit. Il constate un gain en volume musculaire, et en force supérieur à n'importe quel régime hyperprotidique. Toutefois certains effets indésirables surgissent et il doit attendre 1958 pour que le laboratoire CIBA crée la methandrostenolone, le fameux Dianabol (stéroïde anabolisant) qu'il jugera plus facilement utilisable. En secret, le praticien administre ce produit à trois haltérophiles du York Barbelle Club en associant un nouveau programme d'entraînement par "contraction isométrique". Les résultats sont stupéfiants et, enthousiaste, Bob Hoffman les publie dans Strength and Health, un périodique destiné aux haltérophiles et aux culturistes.
Les représentations du dopage. Approche psycho-sociologique
Patrick Laure
Thèse STAP Nancy 1 - 1994
... Cependant Bob Hoffman se gardera bien de donner tous les secrets de sa préparation, il conservera par devers lui l'utilisation du Dianabol.
Somme toute, le grand public n'est pas totalement ignorant en la matière. Par exemple paraît en 1945 un ouvrage intitulé The Male Hormone (dont le sujet vous l'avez compris est la testostérone et ses différentes utilisations) de Paul de Kruif. Un ouvrage qui bénéficiera d'une belle couverture publicitaire, notamment avec la parution d'extrait(s) dans le Reader's Digest (excusez du peu) et d'une pleine page de promotion dans Newsweek : HORMONE FOR HE-MEN (Cf. Testosterone Dreams de John Oberman). He-men, peut se traduire par les balèzes.
Somme toute, le grand public n'est pas totalement ignorant en la matière. Par exemple paraît en 1945 un ouvrage intitulé The Male Hormone (dont le sujet vous l'avez compris est la testostérone et ses différentes utilisations) de Paul de Kruif. Un ouvrage qui bénéficiera d'une belle couverture publicitaire, notamment avec la parution d'extrait(s) dans le Reader's Digest (excusez du peu) et d'une pleine page de promotion dans Newsweek : HORMONE FOR HE-MEN (Cf. Testosterone Dreams de John Oberman). He-men, peut se traduire par les balèzes.
Eric Lamy :
[...]
Il a fallu attendre les années 50 pour que les Soviétiques comprennent l'intérêt "sportif" qu'ils pourraient (...) tirer [des anabolisants]. Mais ce n'est qu' au Jeux de Melbourne, en 1956, que Ziegler, le médecin de l'équipe américaine d'haltérophilie, a appris l'existence de la testostérone par un confrère soviétique (....) ces produits-là étaient réservés à l'haltérophilie et aux lanceurs, qui étaient des sports stratégique puisqu'ils étaient sports olympiques, (...). Mais Bill Pearl a vite découvert le pot aux roses. Vers 1957, son tour de biceps est "miraculeusement" passé de 47 cm à 52 cm. En gros il faut tout de même attendre les Jeux de Rome, en 1960, pour que le secret s'évente sous l'influence, notamment, de Bob Hoffman qui commercialise sa "méthode isométrique". Quand vous voyez parler d'"isométrique", dans les années 60, ça n'a rien à voir avec le régime isométrique de contraction musculaire. C'est le nom de code pudique employé pour parler de la charge (de testostérone). (...) Le Dianabol est arrivé à Mr Universe en 1962. [....]
Entretien entre Emmanuel Legeard et Eric Lahmy, Le monde du Muscle n° 250 - Janvier 2005
... C'est donc à la fin des années 50 que l'utilisation du Dianabol commence a entrer dans la routine d'entraînement de certains champions de culturisme. Précisons toutefois que cette hormone, et surtout son utilisation n'était pas illégale à l'époque.
Bill Pearl a par ailleurs battu en 1953 un compétiteur qui deviendra connu dans un autre domaine, sauras-tu le reconnaitre ?
Bill Pearl |
La popularité du Dianabol deviendra si grande qu'il gagnera le surnom de Breakfeast of Champions, un petit-déjeuner qui ouvrira la voie vers le gigantisme musculaire.
Ma théorie est que Stan Lee & Jack Kirby subissant comme tout à chacun l'épistémè de son leur époque ont, non seulement traduit au travers de Hulk ce mouvement de fond : l'arrivée des stéroïdes anabolisants = rayons gamma mais qu'en plus ils ont anticipé la transformation des athlètes ....
Par ailleurs, si depuis 1948 il existait une compétition appelée Mr. Universe, en 1965 l'univers devenu trop petit pour leur gabarit, c'est vers l'Olympe que les champions regardent en concourant pour le Mr. Olympia.
Coïncidence ? les origines de Hulk nous emmèneront elles aussi dans le domaine des dieux.
Sergio Oliva |
Coïncidence ? les origines de Hulk nous emmèneront elles aussi dans le domaine des dieux.
Et puis, plus prosaïquement la transformation de Bruce Banner en Hulk n'est jamais que application radicale des publicités de Charles Atlas ou de Robert Duranton.
Saisir le zeitgeist n'est certainement pas la moindre des qualités de notre duo de créateurs.
Saisir le zeitgeist n'est certainement pas la moindre des qualités de notre duo de créateurs.
Sean Connery :)
RépondreSupprimerBravo !
RépondreSupprimerPassionnant une fois encore : plein de pistes à explorer, bravo !
RépondreSupprimerAbsolument fascinant
RépondreSupprimerTrès bien vu, cher Dada
Très bon, tout cela.
RépondreSupprimerMerci de resituer le Dianabol et tout cela, ça met en perspective plein de choses…
Jim