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BRZRKR [Keanu Reeves / Matt Kindt / Ron Garney / Bill Crabtree]

« That’s men were men, whatever that means » 
Peter Bogdanovich à propos de Howard Hawks 
            C’est semble-t-il le célèbre acteur Keanu Reeves qui en a eu l’envie : « J'ai eu cette idée de vouloir jouer un personnage qui pourrait frapper les gens à travers la poitrine et leur arracher les bras… Et puis l'idée de quelqu'un qui est maudit par la violence et qui essaie de comprendre qui il est, et comment il est venu à être ce qu’il est ; tout en acquérant au fur et à mesure du temps la volonté de récupérer son humanité. ». [Sourire]
Un désir qui a finalement pris corps lors d’une rencontre, en 2017, avec l’éditeur de bande dessinée américain BOOM ! Studios™. 
Information: Revenons cependant en arrière, chez les anciens Scandinaves, dont le rituel ursin le plus célèbre, et sans doute le plus fréquent, n’est pas la consommation de la chair ou du sang de l’animal mais le déguisement au moyen de sa peau. Les sagas et les récits de la mythologie nordique mettent en effet en scène des guerriers qui partent au combat revêtus de la peau du fauve qu’ils ont tué. C’est ce vêtement pileux qui les investit des pouvoirs de la bête, les protège de l’adversité et leur donne une vigueur incomparable. Parmi ces guerriers, les plus redoutables sont les fameux Berserkir, soldats d’Odin, principale divinité du panthéon nordique, dieu cruel, fourbe, cynique, secret mais omniscient. Le grand écrivain islandais Snorri Sturluson, dans son Ynglinga Saga, rédigée vers 1220-1230 et constituant la première partie de son immense Heimskringla Saga, est sans doute l’auteur qui a le mieux décrit ces Berserkir : « Ils partent nus au combat, sans armure ni cuirasse, simplement revêtus d’une chemise d’ours, enragés comme des fauves, mordant leur bouclier, tuant tout sur leur passage, massacrant bêtes et hommes ; ni le fer ni le feu ne peuvent rien contre eux, ils sont invincibles. » in L'Ours, histoire d'un roi déchu / Michel Pastoureau
             Toutefois BRZRKR (lire berserker) est avant tout un projet multiformat, ou « cross-media », comme le confirme Thierry Mornet, pugnace éditeur des albums de BD anglo-saxons des éditions Delcourt™, à qui échoit la responsabilité d’en faire un hit hexagonal. 
            Si le nom de Keanu Reeves est un viatique qui ne risque pas d’être un handicap, le recrutement de Ron Garney aux dessins et de Bill Crabtree à la colorisation ne compte pas pour rien non plus. 
Le dessinateur Alessandro Vitti, d’abord embauché, n’aurait pas non plus démérité au vu des quelques planches qui circulent dans l’infosphère (voir supra). 
            Reste que Garney, qui pour le coup évoque le meilleur de Frank Miller, apporte un intérêt qui se suffit presque à lui-même. 
D’autant que les quatre premiers numéros laissent une très large place à l’aspect visuel de l’affaire. Le scénario proposant en effet un pitch largement rebattu :
L’homme connu uniquement sous le nom de « B » est un guerrier immortel, sujet à des accès d’ultraviolence… au détriment de sa raison. « B » a accepté de travailler pour le gouvernement américain en prenant part à des missions trop dangereuses pour le communs des mortels. En échange, il espère obtenir la vérité sur ses origines .... et surtout comment mettre fin à son existence ?!
Un récit qui bénéficie en outre de l’apport de Matt Kindt, scénariste et dessinateur qui d’ordinaire me laisse de marbre (et à qui selon la légende on doit l’orthographe particulière du titre). Mais dont je ne peux que saluer le sens du rythme, et dont les cliffhangers tombent pile-poil.
La lecture mensuelle des quatre premiers numéros que contient ce recueil (plus le premier d'entre eux commenté par Reeves & Kindt) devait être quelque chose !
            Une série que de prime abord je ne recommande pas à Mark Russell [Pour en savoir +] ni aux contempteurs de la masculinité décompléxée. 
On est en effet dans le registre des histoire de durs-à-cuire, Version Augmentée+, et c'est peu de le dire ; rappelez-vous la citation de Keanu Reeves.
Et Kindt n'est pas en reste :
  
            Bref avec un tirage à 20 000 exemplaires, quatre éditions différentes, le soutien de Guy Delcourt lui-même, une stratégie pour que les trois recueils soient commercialisés en l'espace de 8 mois, une promo qui a commencé dès le festival d’Angoulême, les trois premiers épisodes disponibles gratuitement chez Verytoon© ; manifestement Delcourt™ met les petits plats dans les grands. 
            Reste au final un premier tome vendu 16,95 €, vraiment excellent, d'autant plus que le démarrage de l'histoire proprement dite marche comme je l'ai déjà dit, dans un sillon de scénarios déjà largement labouré.
Vivement la suite ! 

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