Publiée par les éditions Le Lézard Noir™, maison d'édition sise à Poitiers, dédiée aux manga, et plus précisément à « la culture underground, de l’art contemporain et des avant-gardes japonaises », ce récit est néanmoins le fruit d'une collaboration entre un scénariste français, Benoist Simmat, et un dessinateur japonais, Eldo Yoshimizu.
Une BD fabriquée donc par, et pour, une maison d'édition française, à l’attention de lecteurs et de lectrices francophones.
Mais qui adopte le sens de lecture japonais.
Une forme hybride qui se révélera, en quelque sorte, prémonitoire de son contenu.
« Gamma Draconis » partage donc son intrigue entre la France et le Japon, entre l'occultisme et la science-fiction.
Si les planches d'Eldo Yoshimizu sont une invitation qu'on ne refuse pas à s'oublier dans une intrigue qui avait tout pour plaire, les dialogues de Benoist Simmat manquent cruellement de naturel.
Ainsi se retrouve-t-on à lire des notes qui expliquent ce que sont les « RG » ou « Haneda ». Deux éclaircissements qui auraient pu apparaître dans l'interaction de leur discussion respective. Idem lorsque que les personnages utilisent des salutations en japonais. Pourquoi utiliser une langue étrangère pour ensuite la traduire ? Surtout dans une situation si univoque.
Et peut-on imaginer sérieusement qu'un personnage puisse faire référence à une « base secrète » sans se sentir ridicule ?
Ensuite la part didactique est trop visible, souvent amené d'une manière maladroite.
Visiblement les uns et les autres ne discutent pas entre eux, mais informent ceux et celles qui les liront. Du moins en donnent-ils la très méchante impression.
Alors que certaines ellipses jettent le trouble inverse.
Dernier point négatif, Benoist Simmat explique dans un entretien que le « but était d'écrire une histoire qui puisse se suffire à elle-même, tout en proposant une fin ouverte. ».
De mon point de vue, « Gamma Draconis » est plus simplement une histoire inachevée.
La fin n'est pas ouverte, il s'agit d'un cliffhanger dans la plus pure tradition des serials qui l'ont inventé. « Gamma Draconis » est le premier épisode d'un feuilleton qui risque d'être très frustrant si une suite n'est pas donnée aux quelques 250 pages de cette très belle édition.
En conclusion, que j'espère pour le moins très provisoire, « Gamma Draconis » ne risque que de s'améliorer du côté des dialogues, et du scénario (un poil téléphoné), si l’indispensable suite voit le jour.
Côté dessin, la fibre artistique d'Eldo Yoshimizu ne risque sûrement pas de s'endormir sur son déjà monstrueux talent. Reste que je suis très curieux de voir ses prochains manga, qui ne sont toutefois qu'une facette de son travail.
Verdict : un album mi-figue, mi-raisin.
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