« red power » ressortit du Polar, sous-genre ethnique.
Son auteur, Thomas King, installe en effet son personnage principal, Thumps DeadfulWater, un Cherokee, ex policier et présentement photographe, dont « red power » est la deuxième enquête, au cœur d'une intrigue dont le titre est suffisamment explicite. Le titre original l'est plus encore (The Red Power Murders).
Or donc, Thumps DeadfulWater se trouve mêlè à l'affaire qui occupera la totalité de l'intrigue en tant qu'adjoint (deputy) du shérif Duke Hockney de Chinook, dans le Montana. Et accessoirement photographe de scène(s) de crime(s).
Si je prends le clavier ce n'est pas tant pour faire une critique de ce roman, que je n'ai pas encore terminé, mais pour rapporter une pratique que je croyais définitivement passée de « mode ».
Le contexte
À un moment donné du récit apparaît un terme qui par ailleurs reviendra ensuite plusieurs fois tout en occupant une place importante dans l'intrigue, et dont je pensais qu'il nécessitait un éclaircissement surtout parce qu'il plante une relation très importante pour l'histoire, tout en n'étant pas très connu.
Je sais - de sources sûres - que les traducteurs n'aiment généralement pas beaucoup les « notes de bas de page », mais pour ma part je les aime assez. Ceci étant dit, la présence, à la fin du troisième chapitre, d'une note de bas de page (bizarrement totalement inutile) m'apprend que les deux traducteurs, Lori Saint-Martin & Paul Gagné, ne semblent pas opposés à son usage. Mais c'est là que ça se corse ....
Bref, plongé dans cette enquête policière plutôt captivante & agréable à lire, je ne pouvais néanmoins pas m'empêcher de cogiter à propos de ce « kemo-sabe » ; le terme en question dont je pensais qu'une précision ne serait pas inutile (connaissant justement sa signification).
Quelques recherches plus tard, j'apprends que ce roman a également fait l'objet d'une commercialisation, l'année dernière, aux éditions Alire™, chez nos cousins québécois donc.
Je me procure finalement cette édition pour y apprendre que les traducteurs sont les mêmes que pour les éditions Liana Levi™. Ce qui me fait dire que j'ai fait tout ça pour rien, puisque ma démarche avait pour but de savoir si l'édition québecoise avait jugé bon d'expliquer le « kemo-sabe » à ses lecteurs.
Mais puisque j'avais l'ouvrage en main, pourquoi ne pas jeter quand même un coup d’œil ! Et c'est là que ça se corse vraiment.
Le texte
Alors si ni Lori Saint-Martin, ni Paul Gagné n'ont jugé bon d'apporter les précisions qui m'obsédaient tant, la version d'Alire™ diffère quelque peu de celle de Liane Levi™.
• Voilà ce qu'on peut lire dans la version québecoise :
« Bonne route, kemo-sabe, dit Hockney en se calant dans son fauteuil. Aujourd’hui est un beau jour pour mourir.»
Thumps sentit son corps se crisper.
— La dimension Gene Autry/Lone Ranger est sympathique, non ?
— Roy Rogers/Lone Ranger.
— Si tu veux, concéda Duke en se penchant vers l’avant. Mais le mieux, c’est la carte elle-même.
— Salt Lake City ?
— Merde, DreadfulWater, fit Hockney, impuissant à contenir son sourire. Tu as encore les bons réflexes.
Qu’est-ce qui s’est passé là-bas, au juste ?
• Et ce qu'on peut lire dans la version hexagonale :
– « Bonne route, kemo-sabe », dit Hockney en se calant dans son fauteuil.
« Aujourd’hui est un bon jour pour mourir. »
Thumps sentit son corps se crisper.
– Sympathique, non ? Mais le mieux, c’est la carte elle-même.
– Salt Lake City ?
– Merde, DreadfulWater, fit Hockney, impuissant à contenir son sourire. Tu as encore les bons réflexes.
Qu’est-ce qui s’est passé là-bas, au juste ?
Oui, que s'est-il passé là-bas au juste semblent aussi se demander le Lone Ranger & son fidèle Tonto (respectivement interprétés par Clayton Moore & Jay Silverheel, un authentique Mohawk) ?
Toute une partie de la discussion est passée à la trappe (en sus, la note de bas de page complétement insignifiante de l'édition française n'est pas dans celle d'Alire™).
Et pourtant, l'extrait manquant, sans apporter de précision sur ce que « kemo-sabe » veut dire, le contextualise (et ajoute à la relation entre les deux hommes). En effet, « kemo-sabe », est l'expression qu'utilise Tonto, le compagnon Comanche (ou Potéouatamis c'est selon) du Lone Ranger pour s'adresser à lui dans la série télévisée des années 1950.
Ce surnom exprime l'idée de fidélité, de confiance mutuelle, d'amitié qui lit les deux hommes.
S'agissant du roman de Thomas King il y a bien évidemment un sous-entendu humoristique de la part d'un personnage (le shérif) qui en manque singulièrement. Ce terme aide à planter également la relation entre les deux hommes (comme dit au tout début de mon papier).
À condition de savoir ce que ça veut dire.
Reste que l'absence de note de bas de page apparaît, après la découverte du caviardage de l'édition française, bien anodine en comparaison.
Je serais curieux de savoir pourquoi un éditeur élague ainsi le texte original (vous pensez bien que j'ai aussi jeté un œil sur la V.O) ?
Bref Liana Levi™ vient de perdre un lecteur.
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P-S : Je crois que contrairement à ce qu'avance Thomas King via ses personnages, ni Gene Autry, ni Roy Rogers n'ont à ma connaissance interprété le Lone Rangers.
P-P-S : Pour les amateurs d'anecdotes, le Lone Ranger est d'abord apparu à la radio, la même radio de Detroit a produit 3 ans plus tard un autre duo de justiciers masqués basé sur le même concept, le Frelon Vert et son fidèle compagnon Kato (alias Bruce Lee, dans la version TV plus tardive).
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