Accéder au contenu principal

Une étude en vert [Neil Gaiman / Michel Pagel]

On peut comparer l'écriture d'une histoire à la réalisation d'un tour de prestidigitation.
Surtout dans le cas d'histoires courtes, ne nécessitant pas trop de rebondissements.
Mais d'abord le contexte.
            Comme le rappelle Neil Gaiman dans une des introductions qu'il affectionne, « Une étude en vert » fait partie d'un plus vaste panorama, celui de l'Univers Wold Newton™. Du nom d'une bourgade anglaise où, en 1795, est tombée une météorite dont les radiations ont affecté les occupants d'une diligence qui passait à proximité. Du moins c'est ainsi que le rapporte Philip José Farmer, précisant que les descendants des passagers de ladite diligence sont devenus des personnages célèbres, qui sous le nom de Lord Greystoke alias Tarzan, qui sous celui de Sherlock Holmes ou encore de Doc Savage (liste non exhaustive).
L'idée de Farmer était d'une part de considérer que ces personnages littéraires avaient vraiment existé, mais aussi qu'ils se côtoyaient. La véracité de leur existence lui permettait d'extrapoler de nouvelles aventures (Chacun son tour, Tarzan vous salue bien, La Jungle nue,etc.), en les affublant d'un pseudonyme pour certains (pour des questions de droits).
L'idée de réunir des personnages littéraires sera reprise avec un brio certain par Alan Moore, lorsqu'il inventera sa Ligue des Gentlemen Extraordinaires©
Et d'une certaine manière anticipée par Carolyn Wells qui rassemblait, dès 1912 autour de Sherlock Holmes, tout ce que la société de l'époque comptait comme détectives littéraires fameux au sein de la bien nommée « Société des Détectives Infaillibles® ». 

Mais venons au tour de magie promis. Celui-ci s'articulera en trois temps :  

            La promesse
Le titre de ladite nouvelle, « Une étude en vert », ses prémices : la rencontre entre un détective-conseil londonien et un ancien combattant d’Afghanistan, les actualités théâtrales, les publicités ;  tout prépare le lecteur à adopter une certaine tournure d'esprit.


            Le tour
L'enquête proprement dite. 
Un whodunit dans une Angleterre parallèle, « où Sherlock Holmes rencontre l’univers de H. P. Lovecraft », et où Neil Gaiman ne ménage ni son talent ni le lecteur. Et son penchant naturel pour construire sa propre histoire.

            Le prestige
Mais le « tour », aussi réussi soit-il (et il l'est) ne suffit pas. Arrive le « prestige ».
Un coup de théâtre en forme de parallaxe. 
Brillant !

             « Une étude en vert » est une nouvelle qui fait partie du recueil Des choses fragiles (Nouvelles et merveilles), traduit par Michel Pagel, et que je propose au Challenge-lecture des Lectures du Maki.   
Et mars est toujours le mois d'Emmanuel Chastellière chez Bookenstock !        

Commentaires

  1. J'ignorais tout du panorama de l'Univers Wold Newton. Merci pour ces explications qui me font considérer autrement cette nouvelle que j'avais lue dans sa forme adaptée en comics par Rafael Albuquerque. Je vois que j'étais passé à côté de beaucoup de choses.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Triple frontière [Mark Boal / J.C. Chandor]

En même temps qu'un tournage qui devait débuter en 2011, sous la direction de K athryn B igelow, Triple frontière se verra lié à une tripotée d'acteurs bankables : S ean P enn, J avier B ardem, D enzel W ashington. Et même T om H anks. À ce moment-là, le titre est devenu Sleeping dogs , et d'autres noms circulent ( C hanning T atum ou encore T om H ardy). Durant cette période de valses-hésitations, outre M ark B oal au scénario, la seule constante restera le lieu où devrait se dérouler l'action. La « triple frontière » du titre est une enclave aux confins du Paraguay , du Brésil et de l' Argentine , devenue zone de libre-échange et symbole d'une mondialisation productiviste à fort dynamisme économique. Le barrage d' Itaipu qui y a été construit entre 1975 et 1982, le plus grand du monde, produirait 75 % de l’électricité consommé au Brésil et au Paraguay . Ce territoire a même sa propre langue, le « Portugnol », une langue de confluence, mélange d

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations dont l'évidence paraît pour