Accéder au contenu principal

ROCHE LIMIT (Michael Moreci / Vic Malhotra)/Glénat Comics

... Je n'avais pas dans l'idée de lire cette histoire de S-F à laquelle je n'avais d'ailleurs pas prêté beaucoup d'attention ; mais ce premier tome est le cadeau d'un libraire qui travaille où j'ai mes habitudes (Si jamais vous passez par ici, encore merci). 

Les avis que j'ai lus après avoir terminer ce premier tome laissent entendre que pour certains lecteurs, il y a trop de personnages, qu'ils sont mal gérés, voire qu'ils ne servent que de "chair à canon". 
Pour ma part j'ai eu un tout autre ressenti. 
Ces différents personnages sont là, dont certains pour un bref passage en effet, pour donner selon moi du "volume" à l'histoire en dessinant en creux l'atmosphère (sans jeu de mots) de cette planète et proposer différents point de vue qui construisent un background à "Singularité" (titre du premier volume ou en France, du premier tome d'une trilogie si j'ai bien compris). 
Et la façon dont c'est fait me satisfait entièrement, je trouve même le procédé astucieux.
Le nombre (relativement) important de protagonistes ne m'a pas gêner outre mesure, j'ai eu l'occasion de lire des romans où je devais prendre des notes sur les personnages pour m'y retrouver, et là je n'en ai pas ressenti le besoin. Donc rien d'insurmontable.
De plus, les dialogues qui participent de l’intérêt qu'on peut ou pas témoigner à ces personnages, sont vraiment bien écrits. Finalement certains d'entre eux sont plus vivants par ce qu'ils disent plutôt que grâce à ce qu'il font. 
L'ajout de (fausses) pages de magazines, de diapositives, etc., est une astuce qui  marche bien avec moi, ce "rédactionnel" additionnel pour ainsi dire "intradiégétique" accentue (souvent) mon immersion dans ce que je lis : 

Et encore une fois ça a bien fonctionné. 

Et puis ROCHE LIMIT n'a eu de cesse, sans que je puisse mettre le doigt précisément sur quel(s) aspect(s) de l'histoire, d'évoquer tout un pan de la S-F que j'aime bien lire. 

Enfin si, un aspect m'est clairement apparu, celui du mélodrame "étasunien", qui remonte - ce qui ne rajeuni personne - à Hugo Gernsback à l'orée du 20ème siècle (voire un peu avant dans les dime-novels avec Luis Philip Senarens, auteur dont s'inspire justement Gernsback) et qui est depuis en S-F une sorte de motto. Pour le coup, le space opera ou disons ici le planet opera, vu par Michael Moreci est clairement une extension de la Frontière (celle du Far West) avec tout son folklores et ses légendes à peine ripolinée (ce qui n'est pas un reproche). 
 Reste le dessin, qui si j'avais dû acheter ce recueil m'en aurait très certainement dissuadé.

Erreur fatale !
Car une fois plongé dans l'histoire, le scénario m'a captivé à un point tel que j'en ai oublié mes premières réticences, et que j'ai fini par lui trouver un certain charme. D'autant que rétrospectivement, son évidente sécheresse, son manque de fioriture, ne détourne pas l'attention de l'histoire, voire lui donne même un poids supplémentaire ; une sorte de synergie entre le fond et la forme. Le dessin est l'expression de la vie sur cette planète : âpre, pas glamour pour deux sous. Austère.
Il y a aussi un autre aspect qui m'a séduit c'est l'affiliation de ROCHE LIMIT au "noir", comme on dit "film noir" ou "roman noir" ; et la définition du "noir" que je préfère est celle qu'a formulée Thomas Narcejac.

En 1949 Thomas Narcejac (lui-même écrivain de romans policiers) donc, dans un essai à charge (certes) a toutefois donné une belle définition de ce qui est "noir" dans les fictions qui méritent cette épithète : "[..] Ce qui est noir, [..], ce n'est pas, [...] sa violence, sa crudité ; ce n'est même pas le désespoir qu'il peut éveiller chez le lecteur facile à suggestionner, c'est quelque chose de plus foncier et de plus mystérieux que l'on pourrait définir en disant qu'il nous présente le monde comme un TRAQUENARD. [..]" Et ce premier tome de Moreci & Malhorta entre à mon avis, dans le giron du "noir". 

 .... En définitive, ROCHE LIMIT est pour moi une très belle surprises, et une belle découverte, l'une de celles qui m'a donnent envie d'en lire plus, et bien évidemment vous l'avez deviné ; je serai là pour la suite. 

Roche Limit - Tome 1 :  "Singularité"

Scénariste : Michael Moreci 

Dessinateur : Vic Malhotra 
Traducteur : Phillipe Tullier
Lettreur : Fred Urek & Justine

Glénat Comics 

Prix: 15.95 € 

« Notre destinée se trouve dans les étoiles, et je vais nous y conduire » 20 ans après cette promesse, le rêve d’exploration interstellaire du milliardaire Langford Skaargard s’est évanoui dans le cosmos. En dépit de toutes ses bonnes intentions, Roche Limit, la colonie qu’il a fondée à la lisière d’une mystérieuse source d’énergie, n’a pas vraiment évolué comme il le souhaitait… Elle est devenue une zone de non-droit incontrôlable, un creuset de criminalité où les habitants disparaissent régulièrement. 

Commentaires

  1. J'avais également trouvé cette histoire excellente, avec une science-fiction dotée d'une dimension philosophique, sur fond d'enquête. En fait dès que j'ai découvert le proverbe iranien cité par le personnage qui réfléchit en début de tome, j'ai été conquis.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations dont l'évidence paraît pour

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Nebula-9 : The Final Frontier

... Nebula-9 est une série télévisée qui a connu une brève carrière télévisuelle. Annulée il y a dix ans après 12 épisodes loin de faire l'unanimité : un mélodrame bidon et un jeu d'acteurs sans vie entendait-on très souvent alors. Un destin un peu comparable à Firefly la série de J oss W hedon, sauf que cette dernière bénéficiait si mes souvenirs sont bons, de jugements plus louangeurs. Il n'en demeure pas moins que ces deux séries de science-fiction (parmi d'autres telle Farscape ) naviguaient dans le sillage ouvert par Star Trek dés les années 60 celui du space opera . Le space opera est un terme alors légèrement connoté en mauvaise part lorsqu'il est proposé, en 1941 par l'écrivain de science-fiction W ilson T ucker, pour une catégorie de récits de S-F nés sous les couvertures bariolées des pulps des années 30. Les pulps dont l'une des particularités était la périodicité ce qui allait entraîner "une capacité de tradition" ( M ich