Accéder au contenu principal

Le Volcryn [G.R.R Martin/Odile Sabathé-Ricklin]

••• Si j'en crois Apophis [Pour en savoir +], la novella de G.R.R Martin tient du défi.
En effet, l'auteur, dont je crois qu'il n'est plus nécessaire aujourd'hui de retracer le curriculum vitæ, tente de prouver en l'écrivant, que l'on peut associer la SF et l'horreur dans une même histoire. Deux genres, dont un critique aurait affirmé qu'ils étaient incompatibles.
Or donc, Le Volcryn, dans une traduction d'Odile Sabathé-Riclin, révisée par le regretté Ayerdhal, conjugue l'un et l'autre sous l'angle du gothique. Non seulement Martin gagne son pari, mais il écrit de surcroît un « space opera gothique » très réussi. Ce qui, paradoxalement, le rend assez prévisible aux aficionados de l’esthétique de la terreur, initiée par Horace Walpole et Le Château d'Otrante (1764) ; et enterrée par Mary Shelley et son Prométhée moderne (1831). Roman hybride, puisqu'il parachève à la fois l'âge d'or du gothique anglais, tout en étant le premier roman de science-fiction de l'Histoire de la littérature moderne. 
G.R.R. Martin ne se contente cependant pas de transposer les motifs du gothique dans l'espace de la SF, comme on le ferait d'un cadavre exquis à la mode surréaliste. Effectivement, l'auteur multi-récompensé connait ses classiques ; et nul doute que l'expérience de Victor Frankenstein, ravaudant des morceaux de cadavres pour le résultat que l'on sait, le hante lui aussi.
A contrario, il donne une légitimité au château gothique, qui devient ici un cargo de l'espace tout aussi labyrinthique que celui d'Otrante. Idem pour l'incontournable fantôme, dont on est sûr qu'il augmentera le spectre de nos sensations, et dont les prouesses réticulaires s'adaptent étonnamment à un certain type de SF.  
Martin ira jusqu'à s'approprier ce qui faisait, à l'époque, toute l'horreur de Frankenstein ou le Prométhée moderne, et par-là en démontrer la modernité : un être né sans reproduction biologique. Shocking!

Il n'oubliera pas plus de convoquer le Sublime, celui cher à Edmund Burke, aussi inséparable du gothique que Tom de Jerry, que les moins connaisseurs prendront sûrement pour du sense of wonder.
Ce en quoi ils n'auront pas tort non plus.

••• Je pourrais encore citer Malantha Jhirl native de Prométhée, ou « cette mélancolie luxueuse et solennelle qu'inspire le spectacle d'images prodigieuses » que semblent ressentir Karoly d'Branin et Agatha Marij-Black, si cette description n'était pas celle écrite par Ann Radcliffe dans Les Mystères du château d'Udolpho en 1794, mais cela n'ajoutera rien à ma démonstration. D'autant qu'on peut tout à fait lire cette histoire, sans avoir besoin de s'apercevoir que G.R.R. Martin a écrit un space opera gothique.

        En définitive, moins dithyrambique qu'Apohis [Pour en savoir +], j'ai toutefois apprécier Le Volcryn en tant qu'exercice de style, et pour le ravissement que le Sublime de la novella est parvenue à créer.

Pour les amateurs de space opera gothique, je ne saurais trop conseiller de voir le film de Paul W. S. Anderson ; Event Horizon, le vaisseau de l’au-delà [Pour en savoir +]. Une petite réussite dans son genre. 

L'Épaule d'Orion™, de retour du fin fond de la galaxie, vous en parle aussi [Pour en savoir +]
__________________________
Je suis heureux de vous annoncer la nomination de la novella Le Volcryn au Challenge Summer Short Stories of SFFF – saison4 !
  

Commentaires

  1. Je recommande ce petit roman, il est bien fichu et distrayant, et ça future adaptation télé devrait être chouette.

    curieusement, il m'a donné envie de relire Nova, de Samuel Delany, roman qui mixe space-op et Moby Dick et que j'avais beaucoup aimé.

    RépondreSupprimer
  2. Je note le "Nova" de Delany ; merci amigo !

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Triple frontière [Mark Boal / J.C. Chandor]

En même temps qu'un tournage qui devait débuter en 2011, sous la direction de K athryn B igelow, Triple frontière se verra lié à une tripotée d'acteurs bankables : S ean P enn, J avier B ardem, D enzel W ashington. Et même T om H anks. À ce moment-là, le titre est devenu Sleeping dogs , et d'autres noms circulent ( C hanning T atum ou encore T om H ardy). Durant cette période de valses-hésitations, outre M ark B oal au scénario, la seule constante restera le lieu où devrait se dérouler l'action. La « triple frontière » du titre est une enclave aux confins du Paraguay , du Brésil et de l' Argentine , devenue zone de libre-échange et symbole d'une mondialisation productiviste à fort dynamisme économique. Le barrage d' Itaipu qui y a été construit entre 1975 et 1982, le plus grand du monde, produirait 75 % de l’électricité consommé au Brésil et au Paraguay . Ce territoire a même sa propre langue, le « Portugnol », une langue de confluence, mélange d

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Big Wednesday (John Milius)

Une anecdote circule au sujet du film de J ohn M ilius, alors qu'ils s’apprêtaient à sortir leur film respectif ( La Guerre des Etoiles , Rencontre du Troisième Type et Big Wednesday ) G eorge L ucas, S teven S pielberg et J ohn M ilius  auraient fait un pacte : les bénéfices de leur film seront mis en commun et partagés en trois. Un sacré coup de chance pour M ilius dont le film fit un flop contrairement aux deux autres. Un vrai surfeur ne doit pas se laisser prendre au piège de la célébrité  Un vrai surfeur ne doit pas se sentir couper des siens. Il ne doit pas courir derrière les dollars, ni gagner toutes les compétitions. [..] M idget F arrelly champion du monde de surf 1964  ... Big Wednesday est l'histoire de trois jeunes californiens dont la vie est rythmée par le surf ; on les découvre en pleine adolescence au cours de l'été 1962, et nous les suivrons jusqu'à un certain mercredi de l'été 1974.   L'origine du surf se perd dans la nuit des