Accéder au contenu principal

Le Monde Obscur [Henry Kuttner / A. Modlinger]

« Le Monde Obscur1972 » est une novella signée Henry Kuttner, parue en 1946 dans le pulp magazine Startling Stories
On estime cependant qu’elle a très probablement été écrite en collaboration avec son épouse C.L. Moore. Laquelle aura une très belle carrière sous son propre nom, et une influence considérable dans le milieu de l’Imaginaire® étasunien. 
            « Le Monde Obscur » s’articule à partir de ce qu’il est convenu d’appeler la prémisse « ruritanienne ». C’est-à-dire que comme dans le roman d’Anthony Hope Le prisonnier de Zenda1894 le personnage principal se substitue, grâce à sa ressemblance physique dans le cas d’espèce, à un autre ; lequel occupe une place éminente dans l’histoire qui va être racontée. 
Dans le roman de Hope, il s’agit du futur roi de Ruritanie. CQFD !
            Dans « Le Monde Obscur » Henry Kuttner conjugue cette prémisse au planet opera dont l’écrivain Edgar Rice Burroughs s’était fait une spécialité au début du XIXe siècle, avec notamment son héros, John Carter, qu’il n’avait pas hésité à envoyer sur Mars. Enfin Barsoom pour ses habitants. 
Manière pour Burroughs de poursuivre la légende de la Frontière™ chère à Frederick Jackson Turner. 
Que le début de la novella dont il est question ici, commence à Chicago n’est à mon avis certainement pas un hasard. Puisque E.R. Burroughs en était justement natif. 
            Si la façon qu’aura John Carter de se rendre sur Barsoom ne préoccupait pas vraiment E.R. Burroughs, Henry Kuttner s'intéresse au moyen qu'aura son héros de voyager. Au point d'en donner à lire le mode d'emploi.
Cependant si la société que découvre son personnage principal a tout d’un monde tout droit sorti d’un récit de Fantasy, les aspects qui appartiennent à ce (mauvais) genre y sont a contrario, rationalisés. Si les explications ont finalement peu à voir avec la science, cette tentative place ce texte à la croisée de deux (mauvais) genres quasi antinomiques : la Fantasy donc, et la Science-fiction. Ainsi évoque-t-il tantôt le comic strip Flash Gordon dessiné par Alex Raymond (et très largement inspiré justement par John Carter), mais aussi ( et pour cause) le cycle dit des Princes d’Ambre de Roger Zelazny. Ce faisant, « Le Monde Obscur » ressortit - en bonne logique - à la « science-fantasy » ! 
            Ceci étant dit, « Le Monde Obscur » est un court récit dont je peux dire après l’avoir lu, qu’il tient admirablement bien la distance, eu égard à sa date de publication, et à la flopée d’épigones qu’il a vraisemblablement suscitée et que j’ai pu lire. 
Qu’ils aient été écrits par Otis Adelbert Kline, Edmond Hamilton, ou encore Michael Moorcock (sous le pseudonyme d’Edward Powys Bradbury), voire plus récemment, et de ce côté-ci de l’Atlantique par le scénariste Thierry Smolderen et le dessinateur Alexandre Clérisse. 
Ce tour de passe-passe narratif, qui consiste à remplacer un personnage moins bien doté en lieue et place d'une autre au statut plus enviable, ou à le projeter dans un monde d'aventures sur une planète d'outre-espace qui n'attendait que lui, n'est pas sans évoquer la place du lecteur qui lui aussi plonge dans un autre monde, et vit par substitution les aventures de tel ou tel héros. 
           Au final « Le Monde Obscur » est une courte histoire old school, où les personnages, qu'ils soient du bon ou du mauvais côté, qu'ils soient des héros ou des traîtres, sont surtout motivés par un idéal. Chez aucun d'eux il n'y a de nihilisme.
Aussi retors qu'ils soient, même les méchants croient à ce qu'ils font.
« Le Monde Obscur » est un récit d'évasion vif, prenant, et réussi. En un mot : intempestif.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Juste cause [Sean Connery / Laurence Fishburne / Ed Harris / Kate Capshaw]

« Juste Cause 1995 » est un film qui cache admirablement son jeu.             Paul Armstrong , professeur à l'université de Harvard (MA), est abordé par une vieille dame qui lui remet une lettre. Elle vient de la part de son petit-fils, Bobby Earl , accusé du meurtre d'une enfant de 11 ans, et qui attend dans le « couloir de la mort » en Floride . Ce dernier sollicite l'aide du professeur, un farouche opposant à la peine capitale.   Dès le départ, « Juste Cause 1995 » joue sur les contradictions. Ainsi, Tanny Brown , « le pire flic anti-noir des Everglades », dixit la grand-mère de Bobby Earl , à l'origine de l'arrestation, est lui-même un africain-américain. Ceci étant, tout le film jouera à remettre en cause certains a priori , tout en déconstruisant ce que semblait proposer l'incipit du film d' A rne G limcher. La déconstruction en question est ici à entendre en tant que la mise en scène des contradictions de situations dont l'évidence paraît pour

Nebula-9 : The Final Frontier

... Nebula-9 est une série télévisée qui a connu une brève carrière télévisuelle. Annulée il y a dix ans après 12 épisodes loin de faire l'unanimité : un mélodrame bidon et un jeu d'acteurs sans vie entendait-on très souvent alors. Un destin un peu comparable à Firefly la série de J oss W hedon, sauf que cette dernière bénéficiait si mes souvenirs sont bons, de jugements plus louangeurs. Il n'en demeure pas moins que ces deux séries de science-fiction (parmi d'autres telle Farscape ) naviguaient dans le sillage ouvert par Star Trek dés les années 60 celui du space opera . Le space opera est un terme alors légèrement connoté en mauvaise part lorsqu'il est proposé, en 1941 par l'écrivain de science-fiction W ilson T ucker, pour une catégorie de récits de S-F nés sous les couvertures bariolées des pulps des années 30. Les pulps dont l'une des particularités était la périodicité ce qui allait entraîner "une capacité de tradition" ( M ich