« Prophecy », un thriller en 3 tomes, a une histoire éditoriale singulière puisque Ki-oon™, l'éditeur français, l'a expressément commandé au mangaka Tetsuya Tsutsui.
«
Je suis un fervent lecteur de Dostoïevski, et notamment j’adore son
livre Crime et Châtiment dans lequel les personnages principaux sont
tous des déclassés, des moins-que-rien. »
Inspiré par la tuerie qui a eu lieu en 2008 au cœur du quartier d'Akihabara, à Tōkyō, le manga « Prophecy » s'en démarque en complexifiant les actes de Paperboy, et ses motivations, par rapport à ceux de Tomohiro Katō, le meurtrier du 8 juin. De la tuerie en question, ne restera tout au plus qu'un événement lisible dans le deuxième tome.
En effet si « Prophecy » s'inspire de notre quotidien, sa mécanique scénaristique est si précise, si méticuleuse, et si proactive, qu'il ne fait aucun doute qu'on se trouve dans une œuvre de fiction.
Toutefois, l'emballement que les « réseaux sociaux » y génèrent, ne doit rien à la fiction. Comme peut s'en rendre compte quiconque s'y risque, même en simple visiteur.
Si Tesuya Tsutsui part d'un fait divers, et si « Prophecy » peut bien entendu questionner la société dans laquelle nous vivons, il s'agit d'abord et avant tout d'un divertissement.
Ainsi la manière dont l'auteur nous manipule, notamment en révélant l'origin story de Paperboy, dans une tentative de modifier notre opinion, révèle le storytelling à l’œuvre.
Il y a clairement une volonté de nuancer ses personnages de la part de Tetsuya Tsutsui ; tout comme il ne s'agit pas pour lui de condamner l'utilisation de l'Internet®. Notamment parce que justement son travail y a été repéré par l'éditeur hexagonal Ki-oon™, bien avant qu'il ne soit publié au Japon.
Mais en faisant cela, le mangaka oriente notre opinion.
Entre les mains d'un conteur de talent, comme peut l'être justement Tetsuya Tsutsui, peu de lecteurs peuvent garder leur libre-arbitre.
Raconter une histoire c'est, en premier lieu, manipuler ceux à qui elle s'adresse.
Vu comme cela, il y a donc un parallèle entre Paperboy et son créateur Tetsuya Tsutsui.
Tous les deux avancent de conserve, l'un manipulant ses followers et le Département Anti-Cybercriminalité, l'autre ses lecteurs.
Et tous les deux avec autant de savoir-faire et de talent l'un que l'autre.
Thriller dont le moindre des atouts est de nous faire prendre des vessies pour des lanternes, « Prophecy » est aussi, me semble-t-il, une histoire de revanche qui imite néanmoins la vie des japonais dans ce qu'elle a de plus réelle. Et de plus dure.
Thriller dont le moindre des atouts est de nous faire prendre des vessies pour des lanternes, « Prophecy » est aussi, me semble-t-il, une histoire de revanche qui imite néanmoins la vie des japonais dans ce qu'elle a de plus réelle. Et de plus dure.
Si comme je l'ai dit, « Prophecy » est bien trop écrit pour n'être qu'un documentaire, le temps de trois tomes Tetsuya Tsutsui réussi à nous le faire croire.
Victoire par ippon !
Cette série de billets sur Tsutsui Tetsuya propose une plongée pour le moins stimulante dans son œuvre; tu réussis à en extirper le tissu thématique et la matière qui serpentent au sein des histoires pour en offrir un éclairage tout à fait personnel dont l'enthousiasme est communicatif. Je ne m'étais pas penché sur cet auteur mais je vais me plonger dans Manhole et Poison City à la première occasion.
RépondreSupprimerJe l'ai découvert je ne sais plus comment, et ce qui m'a d'abord attiré c'est la brièveté de ses histoires. Puis de fil en aiguille je me suis replongé dans ce pan de la BD mondiale avec plus de plaisir que je n'aurais cru.
SupprimerReste que « Noise » sa dernière série m'a moins emballé, c'est moins maîtrisé si je puis dire. Il me semble qu'il dit n'avoir pas décidé de la fin dès le départ de son projet.
Et je trouve que ça se ressent.
Même si ça reste pas mal du tout.