Accéder au contenu principal

Les Nouvelles routes de l'Enfer (Ellis/Guice)

…. En 2001-2002 Warren Ellis écrit une histoire, dessinée par Colleen Doran, publiée sur la Toile (et toujours disponible : Pour en savoir +) intitulée Superidol
Cette histoire repose sur un concept de science molle, la mémétique, qui commence à faire parler de lui à peu près au même moment. 
Même si au demeurant l’idée de ce qui se voulait une approche révolutionnaire de l’étude de la culture, trouve son origine dans un essai plus ancien de Richard Dawkins (Le Gène égoïste/1976).

Pour résumer le mème est à la culture ce que le gène est à la nature. Le mème est pour ainsi dire le « gène » qui permettrait la transmission et l'évolution de la culture humaine.

Mème pas peur
…. En lisant les 6 numéros qu’écrit Warren Ellis entre 2005 et 2006 pour le compte de la collection JLA Classified (#10 à 15 traduits par Jérémy Manesse dans les DC Universe n°23 à 26/Panini) j’ai immédiatement pensé au livre d’Howard Bloom justement intitulé Le Principe de Lucifer (le run d’Ellis s’intitule fort à propos New Maps of Hell*) dans lequel ce Bloom explique sa vison de l’histoire au travers des mèmes et des superorganismes en un mot, au travers de la mémétique. 

Et pour cause Ellis fait lui-même allusion aux mèmes.
Le mème est une idée qui à l'instar de l’œuf de Samuel Butler utilise la poule pour se dupliquer.
Le mème lui se sert de nous pour le faire.
On peut dire que le scénariste anglais a de la suite dans les idées ou, l’illustration par l’exemple du concept même de mème (de Superidol à superorganisme) : artefact aut-répivateur. 
En plus d’utiliser un concept « scientifique » innovant (pour l’époque) et peu connu (et aujourd’hui tombé dans l’oubli ou presque, ce qui revient paradoxalement au même), le scénariste s’ingénie à travailler l’aspect formel de son scénario, celui-ci d’une simplicité enfantine incrémenté par un storytelling - aux tendances expérimentales – se transforme toutefois en une histoire que j’ai trouvée captivante, à l’atmosphère envoûtante. 

Un pour tous ! Tous pour un !
Texte et sous-textes prouvent que l’union fait la force ; pour un résultat dont la somme est bien supérieure à l’addition de ses parties, qui accessoirement est un parfait résumé de la forme que la JLA adopte dans cette histoire : une formidable équipe dont la victoire passe par la manifestation de l'esprit de groupe. 
Ou pour le dire à la manière de Proudhon, la JLA produit ce que ce dernier a appelé l'« aubaine ». 
À savoir, une force collective qu'aucun de ses membres ne pourrait exprimer seul, quelque soit le temps qu'il passerait à tenter de le faire.

Les dialogues – dont certains sont des marqueurs chronologiques d’une belle ingéniosité (voir les deux pages infra) – sont une des grandes forces de ce récit. 
Ils lui donnent un rythme, tout comme l’utilisation de la décompression, dont Ellis est devenu l’un des maîtres à nul autre pareilles, qu'une lecture d'un seul tenant est plus à même de rendre.
Le dialogue en question est celui de Green Lantern
.... Des concepts dont l’utilisation inédite (& collective) a réussi à me transporter aux antipodes de mes attentes. 
Si Ellis mouline les cartes d’une JLA envisagée tel un panthéon de nouveaux dieux à la Grant Morrison, il en fait une belle réussite pour ce run resté dans un relatif anonymat ; ce qu’il ne mérite sûrement pas.
Scénario : 8,5/10 
Dessin : 8/10 
Appréciation globale : Le Diable est dans les détails 
_________
*New Maps of Hell est aussi un ouvrage sur la science-fiction écrit par Kingsley Amis (ce que ne devait pas ignorer Warren Ellis) paru en France sous le sobre titre de L'Univers de la Science-Fiction.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Triple frontière [Mark Boal / J.C. Chandor]

En même temps qu'un tournage qui devait débuter en 2011, sous la direction de K athryn B igelow, Triple frontière se verra lié à une tripotée d'acteurs bankables : S ean P enn, J avier B ardem, D enzel W ashington. Et même T om H anks. À ce moment-là, le titre est devenu Sleeping dogs , et d'autres noms circulent ( C hanning T atum ou encore T om H ardy). Durant cette période de valses-hésitations, outre M ark B oal au scénario, la seule constante restera le lieu où devrait se dérouler l'action. La « triple frontière » du titre est une enclave aux confins du Paraguay , du Brésil et de l' Argentine , devenue zone de libre-échange et symbole d'une mondialisation productiviste à fort dynamisme économique. Le barrage d' Itaipu qui y a été construit entre 1975 et 1982, le plus grand du monde, produirait 75 % de l’électricité consommé au Brésil et au Paraguay . Ce territoire a même sa propre langue, le « Portugnol », une langue de confluence, mélange d

The Words

... The Words ( Les Mots ) est un film qui avait tout pour me séduire : le roman en tant qu'élément principal, des acteurs que j'aime bien ; D ennis Q uaid, J eremy I rons, J . K . S immons et B radley C ooper. Éléments supplémentaire l'histoire se révèle être une histoire dans l'hisitoire. Ou plus exactement un roman à propos de l'écriture d'un roman, écrit par un autre ; entre fiction et réalité.  Je m'explique. Clay Hammon fait une lecture public de son dernier livre The Words dans lequel un jeune auteur, Rory Jansen , en mal de reconnaissance tente vaille que vaille de placer son roman chez différents éditeurs. Cet homme vit avec une très belle jeune femme et il est entouré d'une famille aimante. Finalement il va se construire une vie somme toute agréable mais loin de ce qu'il envisageait. Au cours de sa lune de miel, à Paris , son épouse va lui offrir une vieille serviette en cuir découverte chez un antiquaire, pour dit-elle qu'

Wheelman [Frank Grillo / Jeremy Rush]

En partie produit, et surtout entièrement cornaqué par War Party™, la société de production de J oe C arnahan & de F rank G rillo, et magistralement interprété par ce dernier ; « Wheelman 2017 » repose sur la règle des 3 unités du théâtre dit classique :  • Unité temps : Une nuit.  • Unité d'action : Une attaque à main armée ne se déroule pas comme prévue.  • Unité de lieu : Une BMW E46  Autrement dit, 98% du film se déroule dans une voiture avec seulement F rank G rillo au volant et à l’écran. Son personnage n'interagit avec l'extérieur quasiment que via un téléphone portable.              Tourné à Boston en seulement 19 jours, pour un budget légèrement supérieur à 5 millions de dollars, « Wheelman » est, au moment des comptes, une péloche dégraissée et bien relevée.  D'entrée de jeu les premières minutes donnent le ton : « l'homme au volant » du titre a été embauché pour être chauffeur lors d'un braquage à main armée. Divorcé, sa fille adolescente, d